Paz!
Autres titres:
Real: Renato De Maria
Année: 2002
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 101mn
Acteurs: Cristiano Callegaro, Iaia Forte, Flavio Pistilli, Max Mazzotta, Claudio Santamaria, Matteo Taranto, Frankie Hi-Nrg, Roberto Freak Antoni, Antonio Rezza, Giovanni Lindo Ferretti, Ricky Memphis, Fabrizia Sacchi, Francesco Mastrorilli, Barbara Bonanni, Roberto Citran, Bruno Ardlilesi...
Résumé: Bologne. 1977. Un groupe d'étudiants vit dans un appartement. On va suivre sur 24 heures leur quotidien partagé entre le lycée et l'université au rythme des revendications fascistes et des émeutes. Pour beaucoup la Marijuana et les filles sont leurs principales préoccupations, pour d'autres comme Penthotal ce sont leurs peines de coeur et leurs désillusions. Tous ces personnages vont se croiser au rythme de leurs mésaventures...
Paz! comme Pazienza. C'est en effet des bandes dessinées de l'italien Andrea Pazienza que le réalisateur Renato De Maria s'est inspiré pour son film. Trois des principaux personnages, Penthotal, Zanardi and Fiabeschi, sont en effet issus de l'univers de l'artiste. Les deux premiers appartiennent au comic intitulé Zanardi tandis que Penthotal était le héros de sa propre histoire. De Maria les a réuni ici afin d'illustrer la vie de la jeunesse bolonaise des années 70, plus exactement l'année 1977, sur 24 heures. Paz! est un échantillon de vie d'un groupe d'étudiants et de lycéens, leurs joies et déceptions, leurs amours, leur scolarité, leurs
aspirations politiques, leur penchant pour la marijuana, l'ensemble relié par la mort du chat de la directrice de l'école, égorgé puis pendu à sa porte d'entrée, par Massimo Zanardi, un voyou, un cancre, la plaie du lycée que l'horrible femme va tenter de faire arrêter et emprisonner après avoir trouvé son agenda égaré dans sa cour. Les aventures et mésaventures de ce groupe de jeunes seront régulièrement interrompues par les tentatives de Zanardi et ses amis pour récupérer l'agenda. Quoi de mieux que d'utiliser le premier de la classe pour y parvenir après l'avoir sodomisé puis photographié afin de le faire chanter s'il lui prenait l'envie de refuser, l'ensemble rythmé par les rassemblements de groupes fascistes
dans une Bologne triste et grise.
Paz! appartient aux nouvelles comédies juvéniles aigres-douces italiennes entamées dans les années 90 à l'instar de Radiofreccia de Luciano Ligabue auquel le film de Renato De Maria ressemble à bien des égards à l'exception du ton adopté. Ligabue avait en effet opté pour une atmosphère pleine de nostalgie, souvent sombre, tout en jouant la carte de la fraicheur et de l'innocence afin d'adoucir la gravité des événements, De Maria a quant à lui préféré le ton de la comédie déjantée, délirante, ébouriffée, parfois hystérique, une sorte de trip halluciné, complétement fou qui lui valut parfois d'être comparé à Trainspotting dont il
pourrait être une version italienne. Retranscrire à l'écran l'univers de Pazienza n'est peut être pas chose évidente, les efforts de De Maria ne sont ici qu'à moitié récompensés. La grande réussite du film provient de sa reconstitution de l'ambiance de cette fin de décennie dans une Bologne en pleine crise et confusion politique, triste et froide, d'autant plus crédible que les dialogues du film sont en dialecte bolonais. Le cinéaste a su avec justesse retranscrire l'état d'esprit de la jeunesse d'alors, désillusionnée, les années pré-punk italiennes et d'une Italie plongée dans un climat d'anarchie révolutionnaire, parfaitement représentée à travers la crise existentielle que traverse le personnage de Penthotal dans une ville où les universités
sont assaillies par les groupuscules fascistes et les lycées envahis par les voyous. Penthotal est une sorte de fil conducteur, de noyau central, très certainement le plus attachant des protagonistes, autour duquel gravitent tout un tas de figures qui vont et viennent qu'on pourrait voir comme les projections de ses rêves, de ses cauchemars, de ses fantasmes. Tous se croisent sans jamais réellement se rencontrer, sont mis en scène dans des histoires parallèles et lorsque celles ci se rejoignent, ces caractères semblent ne pas se voir, évoluer dans d'autres dimensions. On entre et on sort en fait de Paz! comme dans une bande dessinée.
Il est dommage que Renato De Maria ait moins réussi la description de tous ses personnages à qui il manque une âme, une épaisseur, une dimension humaine. Aucun ne dépasse vraiment le simple stade de la caricature. Ils se trouvent ainsi assez limités et n'utilisent qu'une trop petite part de leur potentiel. Il est donc difficile de s'y attacher ou d'éprouver une quelconque émotion face à leurs aventures, leurs désillusions, leurs malheurs d'où un certain ennui, un doux sentiment de lassitude, qui lentement envahit le spectateur sans pour autant l'endormir grâce en grande partie à une mise en scène certes discrète mais trépidante.
Reste donc la folie, leur folie et celle du scénario ainsi que la mise en scène qui mélange bande dessinée et surréalisme dans un climat paroxysmique qui dans la dernière demi heure du film versera dans le trash puisque outre le viol sodomite inattendu de l'intellectuel de base le film trouve son apothéose dans le meurtre halluciné de la directrice tout en multipliant les trips sous marijuana et scènes de nu frontaux masculin effrontées dont celle où, très fiers de leur membre respectif, Zanardi et Colas s'exhibent devant deux étudiantes qui comparent ainsi leur anatomie. C'est pour dire que le final aussi pessimiste soit il est totalement explosif à l'image même du personnage qu'interprète le malingre Max Zanotta,
l'attraction principal de Paz! qui à lui seul donne au film ses lettres de noblesse. Hystérique, ébranlé, détonnant, déjanté, sa prestation atteint des sommets lors de l'inoubliable scène de l'examen durant lequel il est interrogé sur Apocalypse now de Coppola. Son entrée en jeu est tout aussi remarquable mais sur un autre point. Comment en effet oublier la longue séquence où il déambule en slip dans l'appartement avant de terminer aux toilettes se vider complaisamment la vessie, un va et vient de la caméra allant dde l'interminable et puissant jet aux grimaces de soulagement qui déforment son visage. A ses cotés on retrouvera Claudio Santamaria, beaucoup plus en nuances, plus touchant. ses séquences sont peut
être les plus intéressantes du film, les plus émouvantes, les plus humaines tout simplement. On retiendra également la prestation de Flavio Pistilli découvert quelques années auparavant dans le rôle du jeune punk de La guerra degli Anto. Il est ici un Zanardi inquiétant, sadique, un être lugubre, un voyou cruel qui n'a cependant jamais été aussi séduisant avec ses longs cheveux raides et gras, d'autant plus étourdissant qu'il nous gratifie d'un audacieux plan de nu frontal où on pourra admirer un sexe généreux propre à décupler nos fantasmes les plus secrets. Il partage cette séquence avec le ténébreux Matteo Taranto, le play boy de l'équipe, fier de ce corps tout en muscles que même sa mère désire.
On notera bon nombre de caméo également, quelques sympathiques figures italiennes incontournables dont Frankie HI-NRG, Giovanni Lindo Ferretti et Roberto Freak Antoni qui donnent à Paz! un coté curiosité pelliculaire non négligeable.
Accompagné d'une très bonne partition musicale essentiellement composée de chansons de véritables groupes punk italiens d'époque, Paz! qu'on aime ou qu'on déteste ne laissera pas indifférent ne serait ce déjà que pour l'interprétation de Max Zanotta. Transposer à l'écran l'univers d'une bande dessinée n'est jamais évident, De Maria essuie ici un demi échec mais Paz! contient suffisamment de points positifs, de moments drôles et divertissants agrémentés d'une note de folie délirante pour suffisamment retenir l'attention et faire passer 100 minutes somme toute sympathiques. Paz! est quoiqu'il en soit un film à découvrir quelques soient ses défauts.