Due occhi per uccidere
Autres titres: La morte cancello l'uomo ma la vita oltre la morte lascio: due occhi per uccidere / Two eyes to kill
Real: Renato Borraccetti
Année: 1968
Origine: Italie
Genre: Polar / Noir
Durée: 56mn
Acteurs: Jack Taylor, Aïché Nana, Warren Daniels, Diego Parravicino, Gia Sandri, Augusto Bonardi, Eva Bartoli, Ignazio Balsamo, Giulio Turrini, Ninì Galiano, Fabio Testi...
Résumé: Condamné à mort pour un crime qu'il n'a pas commis, un homme est guillotiné. Avant son exécution il a fait don de ses yeux à son meilleur ami qui a juré de prouver son innocence. Aidé de Nadia, il va tout mettre en oeuvre pour que le véritable meurtrier, Max, le gérant d'une boite de nuit louche, soit arrêté et puni. Grâce à de subtils subterfuges, il va le pousser dans ses ultimes retranchements afin qu'il craque...
Due occhi per uccidere fait partie de ces énigmes italiennes dont l'épais voile de mystère qui les entoure est loin, très loin d'être levé. Aujourd'hui totalement oublié, ce petit polar est source de bien des questions. Sur son réalisateur tout d'abord, Renato Borraccetti, dont on ne sait absolument rien. Qui était il? D'où venait il? Est il encore en vie? Des questions restées sans réponse jusqu'à ce jour. La seule chose qu'on peut affirmer est qu'il est l'auteur de trois autres polars Femmina senza cuore en 1952, Cuore di spia en 1953 et La notte dell'addio en 1966. Due occhi per uccidere fut son ultime travail avant qu'il ne s'évapore dans le néant d'où il avait surgi en 1940 en travaillant sur le film de Giorgio Ferroni L'ebbrezza nel cielo.
Unique film produit par l'éphémère firme milanaise Daniel's films, Due occhi per uccidere dont le titre complet est en fait La morte cancello l'uomo ma la vita oltre la morte lascio... due occhi per uccidere est un petit polar étrange qui mêle à une histoire de vengeance classique un soupçon de fantastique. L'intrigue tourne autour du personnage de Max, un gangster cruel qui gère une boite de nuit qui connait quelques gros soucis financiers. Max a fait envoyer à la guillotine un innocent, Jean, accusé du meurtre qu'il a en fait commis. Max se
vengeait ainsi de la relation amoureuse que Jean entretenait avec Rosy, sa fiancée. Avant son exécution, le malheureux a fait don de ses yeux à son meilleur ami, Pierre, qui a juré de prouver la culpabilité de Max et faire ainsi retrouver à Jean son honneur. Grâce à la complicité de Nadia et un dispositif électronique de surveillance il épie Max et tente de l'effrayer. Se sentant menacé, le gangster perd peu à pied. L'heure du face à face à sonner...
Très certainement tourné à Milan, Due occhi per uccidere malgré son titre n'est pas un
giallo. On est ici plus proche en effet du film noir que du pur thriller. Tout le rapproche en effet du film de gangsters, tant le lieu de l'action, un night-club trouble qui sert de repaire à un dangereux criminel et ses sbires que l'histoire elle même, celle d'une vengeance post-mortem d'une des victimes de Max par le biais de son meilleur ami. Malheureusement si sur le papier le scénario peut paraitre intéressant, il en va autrement à l'écran. Quasiment dépourvu de suspens et de scènes d'action dignes de ce nom, Due occhi per uccidere ne décolle jamais vraiment malgré sa durée étonnamment courte, 56 minutes.
Mollement mis en scène, le film, peu passionnant, multiplie les scènes de numéros de danse et de cabaret entrecoupés de quelques paresseuses bagarres chorégraphiées. Désuet, d'une flagrante pauvreté, s'il date de 1968 on a cependant la désagréable impression qu'il date du début des années 60 ne serait ce que par ce dispositif de surveillance droit sorti d'un antique film de science fiction des années 40!
Rien ne retient réellement l'attention et c'est déçu qu'on constate très rapidement que l'élément fantastique n'apparait qu'en filigrane justifiant son titre et son final. En fait Due occhi per uccidere laisse perplexe. Tout semble approximatif. On a beaucoup plus la sensation
d'être face à une esquisse que devant un véritable film. Le scénario est décousu, laissé la plupart du temps à l'état de brouillon, le montage est aléatoire, la photographie d'une pâleur fantomatique (même si l'état de la copie ne permet pas vraiment de juger réellement de sa qualité d'origine). Difficile de noter, faire la critique d'une oeuvre dont on ne sait absolument rien ne serait ce que sur sa durée si courte. Perdu jusqu'à aujourd'hui, Due occhi per uccidere est réapparu via une copie retrouvée miraculeusement à Naples dans un état
malheureusement lamentable. Une restauration approximative redonna un air de jeunesse au film mais la question est de savoir s'il est complet ou non. L'énigme demeurera très certainement. Ne nous reste que cette version rarissime pour pouvoir désormais le visionner.
L'intérêt majeur de ce noir est d'autre part son ouverture, glaciale, lugubre, inquiétante durant laquelle le condamné interprété par un tout jeune Fabio Testi non crédité est amené à la guillotine et exécuté au son d'un magnifique air de trompette mélancolique à souhait joué par Nini Rosso qui servira par la suite de leitmotiv au film. Ecrit par Piero Umiliani il sera
réutiliser deux ans plus tard pour la partition musicale de Django sfida Sartana de Pasquale Squiltieri. D'autre part la présence de Jack Taylor, parfait dans la peau de Max, dont le regard bleu acéré, le visage froid et surtout la folie donnent à l'ensemble un coté angoissant, presque effrayant à chacune de ses apparitions. Surnagent ça et là quelques moments intéressants notamment le ballet entre le démon à tête de chien et la jeune danseuse, l'acharnement de Pierre à terrifier Max par le biais de subterfuges horrifiques et le final plutôt réussi même si trop vite amené. On arriverait presque à regretter par moment que cette
atmosphère assez particulière ne soit pas plus au rendez-vous. De quoi être encore plus amer en imaginant ce que le film aurait pu donner avec plus de moyens et surtout de volonté!
Véritable mystère du cinéma Bis italien, Due occhi per uccidere est en tout cas une très belle pièce de collection pour inconditionnel invétéré, une sorte de Graal qui vaut plus pour la curiosité qu'il suscite que pour sa bien faible valeur cinématographique. Au delà de son aspect collector et plus que tout miraculeux, le film de Borraccetti pourrait très bien rejoindre le néant dans lequel son réalisateur s'est évanoui sans que cela nuise à quiconque mais l'étrangeté de la chose, l'ambiance plutôt particulière de ce noir lui donne une aura somme toute sympathique par delà l'ennui qu'il peut générer.