Mille peccati... nessuna virtu
Autres titres: Mondo sex
Real: Sergio Martino
Année: 1969
Origine: Italie
Genre: Mondo
Durée: 90mn
Acteurs: Riccardo Cucciola (Narrateur)
Résumé: le réalisateur nous propose un tour d'Europe afin de nous faire découvrir les us et coutumes sexuelles de différents pays, de la Suède à la Suisse, l'Angleterre, l'Allemagne en passant par la Suisse et le Danemark en cette fin d'années 60...
A la fin des années 60 le sexe va devenir un des éléments fondamental du mondo, un genre fort controversé principalement lancé par Gualtiero Jacopetti avec son désormais célèbre Mondo cane. En 1967 la sortie de Helga de Erich F. Bender qui tente d'éduquer de façon dramatique le public en matière de sexualité, va donner l'idée à bon nombre de réalisateurs d'orienter le mondo vers l'univers du sexe. C'est ainsi qu'une pléthore de ces pseudo-documentaires vont voir le jour tous porteurs de titres plus alléchants les uns que les autres: Anatomy of love, Sexual partnership, Female sexuality, Love variations, The queer... the erotic, ou encore The wonder of love. Mille peccati... nessuna virtu connu aussi sous le titre Mondo sex, tout premier film d'un Sergio Martino encore inconnu, en fait partie.
Et pour ses débuts au cinéma, Martino ne met guère la barre bien haute, Mille peccati.. nessuna virtu, produit et écrit par son frère Luciano, ne reflète en rien la prodigieuse carrière que le cinéaste connaitra par la suite. Le film ne fait qu'exploiter un sujet alors fort à la mode, la révolution sexuelle et la chute des tabous moraux, de façon aussi niaise qu'inepte. Disons le de suite, Mille peccati... fait partie des mondo les moins percutants que le genre ait connu. Si un panneau en fin de film nous annonce que toutes les scènes auxquelles nous avons assisté sont vraies, ce n'est là que pure stratégie commerciale puisque le film est en grande partie factice et mal joué! Il pointe les us et coutumes en matière de sexe à travers l'Europe et nous ballade donc de la Suède à l'Allemagne en passant par la Suisse et le Danemark entre autres pays. Au cours de ce voyage supposé coquin on découvre donc comment les gens vivent leur sexualité en ces périodes de libération et de liberté sexuelle par le biais de pseudo reportages souvent drôles.
On découvre entre autres "le train rose" spécialement affrété pour que des jeunes filles rencontrent des garçons (le choix se fait naturellement nous dit-on, sont choisies les plus belles, celles peu gâtées par la nature restent sur les quais c'est évident) afin de faire l'amour dans les compartiments non fumeurs. On apprend que désormais dans certaines entreprises allemandes on embauche des jeunes filles pour distraire les hommes d'affaires et qu'il existe des écoles pour apprendre aux femmes à susciter l'intérêt de leur mari. Une jeune allemande est devenue milliardaire en fondant une industrie qui vend du matériel érotique. Des jeunes filles très belles et surtout polyglottes sont recrutées dans de grosses
multinationales pour entretenir et convaincre les clients potentiels, des couples se font payer pour poser très librement pour des photos érotiques (à savoir où commence le terme prostitution, une question à laquelle une des femmes ne saura répondre, un très grand moment comique du film!). Un couple se fait peindre le corps alors qu'il fait l'amour, une jeune frigide s'offre à une secte satanique afin de pouvoir recouvrer sa libido. C'est là le clou du film, haut en couleur et d'une absurdité rarement vue à l'écran durant lequel on reconnaitra le jeune acteur Robin Askwith vu par la suite dans La tour du diable, Queen Kong et La griffe de Frankenstein. Un des autres grands moments de ce mondo est cette secte dont les membres adorent et vénèrent leur nombril!
La drogue est forcément au rendez-vous. Elle est nous dit-on le principal carburant de la jeunesse européenne et des communautés hippie qui de l'amour libre a fait son crédo mais est ce étonnant en 1969! Après nous avoir fait visiter la cuisine délabrée d'un appartement typiquement hippie, on nous présente donc une femme dont l'enfant, un charmant bambin blond, a deux pères et tous vivent sous le même toit, un joint à la main. Et ce n'est rien à comparer de la grande famille hippie londonienne qui en fin de film passe un joint à leurs enfants. On explosera de rire devant d'autres jeunes tous adeptes de la drogue venus en pleine forêt pour tenter de s'y déshabituer en mâchant fermement du papier. Il faut donc voir tous ces jeunes chevelus, guillerets, assis par terre, entrain de déchirer des feuilles de journaux qu'ils mangent sous l'oeil de la caméra. Que penser de ce spectacle psychédélique où on offre au public de la marijuana et autres drogues à fumer pendant que les comédiens s'exhibent nus lors d'une danse frénétique? Le tour d'horizon des drogues n'aurait pas été complet si Martino ne nous avait pas montré en gros plan un jeune junkie
entrain de se faire un shoot de morphine. Le plus sidérant reste toutefois le décalage qui existe entre la franche débilité des sujets et le caractère sérieux des commentaires récités en voix-off par le narrateur, Riccardo Cucciola. Si l'amateur est habitué au coté très souvent solennel des textes qui accompagnent les mondos, ceux ci représentent peut être le nec plus ultra de l'hypocrisie. Si le film en devient par instant presque abject c'est peut être l'unique chose qui plaira à l'amateur puisque Mille peccati... nessuna virtu, rythmé par une partition musicale psyché rock signée Peppino De Luca, avoisine le degré zéro du mondo. Tout amoureux de ce type de cinéma aurait aimé voir beaucoup plus de nudité ce dont il est quasiment exempt, un comble pour un film qui traite de sexualité. Il aurait aussi apprécié
assister à de véritables cours d'éducation sexuelle, voir de vrais couples se prostituant devant la caméra et autres jeunes filles offrant leur corps afin de satisfaire les fantaisies érotiques d'hommes d'affaires libidineux, des shoots et prises d'acide véridiques en pleine ère de la Woodstock generation. Il n'appréciera finalement que les ultimes images particulièrement glauques mais génialissimes où un couple de beatnicks fait fumer un joint à ses enfants en bas âge, hagards. Une séquence définitivement glauque qu'on n'oserait même plus concevoir aujourd'hui. Hormis ce final explosif capable enfin de nourrir sa soif d'abject, il lui faudra malheureusement supporter un interminable condensé de coutumes et modes de vie désuètes et ridicules mal mises en scène et surtout bien trop inoffensives pour provoquer le moindre choc.
Martino récidivera pourtant l'année suivante avec America un giorno puis le réputé America cosi nuda cosi violenta / Amérique nue et violente / Amérique nue, largement supérieur et surtout franchement plus malsain, avant de se lancer enfin avec bonheur dans un cinéma de bien plus grande envergure, celui qui fit son succès.