Il conte Dracula
Autres titres: Les nuits de Dracula / El conde Dracula / Count Dracula / Jess Franco's Count Dracula / Nachts, wenn Dracula erwacht
Real: Jesus Franco
Année: 1970
Origine: Italie / Espagne / Allemagne
Genre: Horreur
Durée: 93mn
Acteurs: Christopher Lee, Klaus Kinski, Paul Muller, Jack Taylor, Soledad Miranda, Herbert Lom, Fred Williams, Maria Rohm...
Résumé: Jonathan Harker, un jeune clerc de notaire, se rend en Transylvanie afin de présenter au comte Dracula les plans du château qu'il vient d'acquérir à Londres. Le jeune homme est loin de se douter à qui il a à faire. Il se rend vite compte que le comte n'est pas humain et qu'il est désormais son prisonnier. Il parvient à s'enfuir et regagne Londres. Il y rejoint sa fiancée Mina mais Dracula est lui aussi arrivé dans la capitale en quête de victimes afin de conserver sa jeunesse éternelle. Mina semble être sa prochaine cible...
A quel mythe n'aura donc pas touché le défunt et dispensable Jesus Franco? Le célèbre réalisateur espagnol, grand artisan et spécialiste de l'érotisme bâclé, après s'être intéressé entre autre à Sade, à Jack l'éventreur, à Frankenstein, aux morts vivants, aux vampires... se penche cette fois sur le cas du comte Dracula. Il tente à son tour d'en donner sa version à travers ce nouveau film en costumes qui se veut un hommage aux films de la Hammer. Coproduction italo-hispano-allemande, Les nuits de Dracula est avant tout une des plus fidèles adaptations du roman de Bram Stoker que le cinéma de genre ait jamais connu. C'est ainsi qu'on retrouve les montagnes de Transylvanie que traverse Jonathan Harker, un jeune clerc de notaire, afin de vendre un château situé en Angleterre au célèbre comte qui voit là un excellent moyen de reconduire sa jeunesse éternelle. Dracula abandonne le malheureux jeune homme à son triste sort et part donc pour Londres commettre ses sanglants méfaits.
Si Jess Franco, réalisateur boulimique, n'a jamais été un grand metteur en scène, plus souvent capable du pire que du meilleur, Les nuits de Dracula demeure nonobstant ses défauts un film plutôt agréable et distrayant malgré la maladresse pour ne pas dire l'incompétence légendaire du cinéaste et le manque évident de moyens. Au crédit du film de jolis costumes, des décors d'époque un peu trop maigres mais plutôt bien reconstitués, une inquiétante partition musicale signée Bruno Nicolai, de beaux éclairages et quelques cadrages réussis presque impressionnant ainsi que, et c'est là son principal atout, la présence de Christopher Lee qui reprend le personnage du fameux comte, offrant ainsi au film un certain prestige. On lui doit les meilleurs scènes du film, les plus angoissantes et les
plus belles également, distillant cette atmosphère gothique si délectable qu'on prend plaisir à retrouver le temps de quelques plans. On sent l'effort de vouloir faire un film dans la continuité de ceux de la célèbre firme anglaise, on s'en approche souvent certes mais Franco n'a ni le talent ni le savoir-faire de notamment Terence Fisher et sa mise en scène, chaotique et irrégulière, d'une trop grande platitude a vite raison des quelques qualités du film. Franco comme trop souvent se contente de visser sa caméra au sol et filme ainsi son histoire qui devient vite d'un statisme irritant, usant et abusant de ses incessants zooms et grands angles.
Le spectateur se trouve ainsi partagé entre irritation et satisfaction, un sentiment mixte d'où découle une certaine déception. Si on sera magnanime quant aux différents raccourcis et diverses suppressions auxquelles le réalisateur dut se soumettre devant la pauvreté du budget alloué, on le sera moins quant aux ponctuelles aberrations du récit, à la nudité des décors et le cabotinage incessant des comédiens qui casse le pseudo sérieux de l'ensemble. On regrettera de trop nombreux effets spéciaux au rabais (la chauve-souris en plastique qu'un technicien agite devant une fenêtre, la ridicule et hilarante attaque des animaux empaillés particulièrement ratée... ), ces paysages méditerranéens (le film fut en majeure partie tourné en Espagne) qui ressemblent bien peu à Londres et les ombres des techniciens et autres caméras et micros qui traversent régulièrement l'écran de façon allègre.
Christopher Lee, toujours impressionnant, est bien en de ça de ses interprétations qu'il donna jadis. Trop peu présent, on risquera d'être fortement attristé par la fin bâclée que lui offre Franco, certainement une des plus stupides et surtout hilarante que Dracula ait connu. Rire aux larmes ou pleurer de désespoir, chacun choisira selon l'humeur du moment! On aura tout de même le plaisir de retrouver la fracassante beauté de celle qui fut la première égérie de Franco, la regrettée Soledad Miranda. A ses cotés surjouent une ribambelle de comédiens dont Maria Rohm, Herbert Lom dans le rôle de Van Helsing, le fadasse play-boy Fred Williams sans oublier l'incontournable Klaus Kinski toujours aussi halluciné dans la peau de Renfield, l'aliéné jadis vampirisé, qui nous offre son numéro de folie habituel sans pour autant réussir à convaincre. Jamais bien inquiétant malgré ses airs renfrognés, il nous offre une interprétation souvent absurde exempte de toute épaisseur.
Les nuits de Dracula dont on doit le montage à un tout jeune Bruno Mattei alors inconnu n'est pas un mauvais film en soi. Au vu de la filmographie de Franco, il fait sans nul doute partie des toutes petites réussites du réalisateur, si jamais le mot réussite peutlui être alloué. Sans jamais égaler les productions Hammer, Il conte Dracula en est un gentil hommage fait de bric et de brac, alternant le pire et le meilleur. L'effort est louable dans la carrière d'un cinéaste qu'on préfère le plus souvent oublié qui dés l'année suivante entamera sa période vampirique avec sa nouvelle égérie mais également compagne, la rebutante et particulièrement vulgaire Lina Romay.