Porco mondo
Autres titres: Porco mondo porno / Corrupción en el senado
Real: Sergio Bergonzelli
Année: 1977
Origine: Italie / Espagne
Genre: Thriller
Durée: 98mn
Acteurs: Karin Well, Carlo De Mejo, Alida Valli, Barbara Rey, Tony Fuentes, Eduardo Bea, Stefano Davanzati, William Berger, Anna Valentino, Monica Zanchi, Arthur Kennedy, Luigi Ida, Aiche Nana, Maurizio Mattioli...
Résumé: Manuela, une jeune fille dépravée, et ses deux compagnons font un braquage dans une banque. Quelques temps plus tard, ils se font inviter dans une partie mondaine chez un éminent sénateur. Durant la fête, sous l'emprise de la drogue, Manuela se donne à ses deux partenaires d'infortune. La jeune fille, machiavélique, a alors une idée. faire chanter le sénateur et lui soutirer de l'argent. Ils prennent des photographies des orgies à laquelle le notable participe. Un des voyous a une relation sexuelle avec le sénateur. Il en profite pour faire quelques clichés lorsque l'homme, pris d'un accès de folie, le tue. Les deux autres s'enfuient mais Manuela est blessée. Elle est soignée par le fils du sénateur qui pour éviter tout scandale maquille le meurtre en accident. Commence alors un dangereux jeu où sexe et perversion se marient pour le meilleur et surtout le pire...
Artisan notable du cinéma de genre un peu trop oublié du grand public, véritable touche à tout, le solide Sergio Bergonzelli s'adonna tour à tour durant toute sa longue carrière au giallo, à la sexy comédie, au nunsploitation, à l'horreur, au film d'aventures, à l'érotisme plus ou moins osé et même au hardcore en fin de carrière. Réalisé en 1977 Porco mondo est quant à lui un bel exemple d'euro-trash qui sur fond politique concilie érotisme, drogue et perversion.
Oeuvre de politico-fiction ou devrions nous plutôt dire «politoxico-fiction» coproduite par l'Espagne Porco mondo nous plonge une fois de plus dans les milieux de la haute
bourgeoisie italienne, plus exactement celle des milieux politiques que Bergonzelli s'attache à montrer sous leurs plus mauvais aspects à travers tout un éventail de personnages tous plus antipathiques, égoïstes, avides, dépravés les uns que les autres. La scène d'ouverture donne le ton du film. La tout aussi splendide qu'impitoyable Manuela accompagnée de ses deux partenaires d'infortune s'offrent un casse qui se terminera par une indécente relation triolique après que les voyous aient pris de la drogue. Invités à une orgie chez un sénateur débauché, les trois cancrelats mettent au point un plan afin de le faire chanter et lui soutirer de l'argent. Grimé en empereur romain, le sénateur donne alors libre cours à ses tendances
homosexuelles en entrainant un des garçons dans sa chambre. Alors qu'il le suce, ses compagnons le prennent en photo mais dans un accès de folie, le voyou tue le sénateur. Alors qu'ils s'enfuient Manuela est blessée par le fils de la victime, Massimo. Il la recueille afin de la soigner et maquille le meurtre en accident afin d'éviter tout scandale. A partir de ce prélude, Porco mondo se transforme en une sorte de jeu pervers et sournois entre les différents protagonistes où se mélangent sexe, violence et trahison.
Sorte de thriller sous acides écrit par Leandro Lucchetti, futur réalisateur du mémorable QHS / Caged - Le prede umane, un des plus mauvais WIP jamais tourné, Porco mondo tente
de donner avec habileté une certaine vision de la société italienne des années 70. Bergonzelli y dépeint un univers anarchique et particulièrement acide de la bourgeoisie. Il réalise une satire cruelle où on retrouve toutes les tares d'un monde où seuls argent et pouvoir semblent exister. Les politiciens et hauts dirigeants sont tous des corrompus débauchés qui masquent leurs perversions derrière la rutilance, usant et abusant de leurs pouvoirs pour mieux dissimuler leurs actes réprimandables dont leurs pulsions homosexuelles. L'homosexualité, indissociable de cette bourgeoisie dévergondée, est une fois de plus décrite comme une déviation qu'on doit punir. Le sénateur se travestit et sera
assassiné, sa fille est lesbienne, elle sera punie par son frère, surprise au lit avec Manuela.
Quant aux enfants s'ils ne sont pas à l'image de leurs géniteurs ce sont obligatoirement des ratés. La jeunesse d'une manière plus générale n'est aux yeux du réalisateur que des cancrelats, des délinquants drogués, violents, dénués de tout scrupule moral.
Un point commun les relie tout de même. Quelque soit le monde auquel ils appartiennent il n'émane aucune sympathie des personnages de Bergonzelli, tous plus odieux les uns que les autres.
Porco mondo, film extrême dans son propos, bénéficie d'un scénario solide et original, d'une
mise en scène alerte sans temps mort agrémentée d'une belle photographie qui met en valeur les décors. Parsemé d'une once de psychédélisme qui reflète parfaitement bien son époque Porco mondo n'évite pas les écueils d'une certaine complaisance inhérente à ce type de cinéma d'exploitation même si la violence n'est ici jamais gratuite. On se délectera entre autre d'une attaque à la perceuse ou de la mort d'un des protagonistes jeté dans une piscine électrifiée. Mais c'est surtout la scène d'ouverture, sa seringue qui se plante dans l' avant-bras, et l'assassinat hallucinant du sénateur grimé en empereur romain en pleine stupre homosexuel qu'on retiendra essentiellement.
L'interprétation plutôt solide est à la hauteur de ce scénario ambitieux. On saluera le jeu absolument parfait parfois impressionnant de Carlo De Mejo qui incarne le fils indigne du sénateur et de la grande Alida Valli toujours aussi impressionnante dans la peau d'une gouvernante austère. Karin Well, sexy starlette habituée aux comédies légères et actrice fétiche de Bergonzelli, est aussi sensuelle que perverse à l'instar de Barbara Rey. Eduardo Bea, Maurizio Mattioli qu'on découvrira entièrement nu entre les mains expertes du sénateur, Tony Fuentes et Stefano Davanzati sont des voyous tout à fait convaincants. Quant à William Berger il endosse la peau du sénateur dépravé, un rôle certes court mais audacieux.
puisqu'il joue nu une partie du temps, l'occasion de remarquer que William était contre toute attente assez bien doté par Dame Nature!
Accompagné d'une jolie partition musicale signée Nino Ciangherotti dont la superbe chanson totalement décalée intitulée ''Manuela", Porco mondo est un de ces produit type de l'euro-trash transalpin de cette fin de décennie. Bergonzelli signe un thriller froid et efficace où l'érotisme et le vice se marient fort bien à une intrigue politique certes intelligente mais pas toujours vraisemblable sans que jamais l'un ne prenne le dessus sur l'autre. Les puristes regretteront peut être que Bergonzelli privilégie parfois le trash à la cohérence mais
gardons à l'esprit que Porco mondo n'est jamais qu'un bel exemple de cinéma d'exploitation et non pas une analyse sociale scolastique. En ce sens, le film, aujourd'hui devenu rare, est une pleine réussite et un très agréable moment à passer.
Il serait grand temps qu'un éditeur s'intéresse à l'oeuvre du cinéaste et la sorte en DVD afin que l'amateur puisse enfin la découvrir dans de bonnes conditions, ce qu'elle mérite amplement.