Die! Die! My darling
Autres titres: Fanatic / Una notte per morire / I muere, muere querida mia / Düstere das haus
Réal: Silvio Narizzano
Année: 1965
Origine: Italie / Angleterre
Genre: Thriller
Durée: 96mn
Acteurs: Stefanie Powers, Tallulah Bankhead, Peter Vaughan, Maurice Kaufmann, Yootha Joyce, Donald Sutherland, Gwendolyn Watts, Robert Dorning, Philip Gilbert, Winifred Dennis, Diana King...
Résumé: Mrs. Trefoile est une vieille femme totalement dévouée à Dieu. Elle vit seule avec ses domestiques dans une maison isolée de la campagne anglaise. Un jour, elle reçoit la visite de Patricia, l'ancienne fiancée de son fils récemment décédé qui lui annonce qu'elle va bientôt se marier. Mrs Trefoile ne peut supporter une telle nouvelle et décide de la retenir prisonnière. Elle l'enferme dans la chambre de son défunt mari afin de purifier l'âme de celle qui devait être destinée à son fils adoré...
Après avoir travaillé aux cotés de metteurs en scène tels que Sidney Furie, Arthur Hiller ou encore Ted Kotcheff l'italien Silvio Narizzano s'est offert un petit passage derrière la caméra le temps de réaliser une poignée de films dont en retiendra essentiellement deux, un polar ultra violent certes peu crédible et brouillon mais totalement fou, Le salopard / Senza ragione, et cette inattendue production Hammer, Die! Die! My darling mieux connue chez nous sous le titre Fanatic qui devrait beaucoup plaire à tous les amateurs de mère ultra possessive et dévote extrême.
La jeune et jolie Patricia s'apprête à épouser à Alan mais avant elle tient absolument à rendre visite à la mère de celui avec qui elle était précédemment fiancée, Stephen, afin de tourner définitivement cette page de sa vie. Il vient en effet de mourir dans un accident de voiture. Elle se rend donc chez la vieille Mme Trefoile pensant n'y passer que quelques heures. A sa grande surprise elle découvre une femme particulièrement bigote, très attachée à son fils et qui souffre encore beaucoup de sa mort. La vieille femme l'invite à passer la nuit chez elle, une vaste demeure perdue au milieu de la campagne anglaise. Elle tient à ce qu'elles aillent toutes deux le lendemain matin rendre un dernier hommage à Stephen.
Patricia accepte, intriguée cependant par l'absence de tout téléphone et surtout de miroir chez son hôte. Le lendemain matin elle découvre une femme bigote, totalement dévouée à Dieu, qui passe le plus clair de son temps à lire la Bible et tenter de sauver son fils du feu de Dieu, d'autant plus que pour elle Patricia a perverti son fils. Elle commence à lui interdire de porter certains vêtements, de se maquiller et lui annonce qu'elle va devoir purifier son âme pervertie. Alors que Patricia, lasse de ses simagrées, a décidé de s'en aller la vieille femme la retient en otage avec l'aide de ses domestiques, Anna et Harry, un couple à son service depuis très longtemps et seul héritier des biens de la bigote à son décès. Patricia se
retrouve prisonnière dans la demeure, obligée de jeûner. Ses tentatives de fuite sont vaines et provoquent la colère de Mme Trefoile qui de jour en jour semble sombrer dans une irréversible folie, de plus en plus investie par Dieu. Elle se voit obligée de tuer Harry surpris entrain de vouloir violer Patricia. Refusant de quitter la demeure, la menaçant de dévoiler ses secrets, elle n'a eu d'autres choix que de l'abattre et cacher son corps. C'est alors que Alan débarque au village à la recherche de sa fiancée, une nouvelle épine dans le pied de la vieille dame qu'elle va devoir évincer. Si dans un premier temps elle y parvient Alan, après avoir découvert une broche appartenant à Patricia sur le gilet d'une cliente de l'auberge
retourne chez Mme Trefoile au moment même où elle s'apprête à sacrifier Carroll pour délivrer définitivement Stephen du mal.
Point de vampire ou de monstre. Pas de fantôme ni même de sombre complot familial pour cette production Hammer sur le tard, juste une vieille femme, une dévote extrême qui ne parvient pas à surmonter la douleur de la perte de son fils adoré, mort dans un accident de voiture juste avant qu'il n'épouse la jolie Carroll. Sur ce point de départ Narizzano tisse une intrigue qui n'a rien d'extraordinaire, plutôt courante et sans réelle surprise mais qui pourtant va réussir à tenir en haleine le spectateur de la première à la dernière minute.
Le film débute comme une comédie noire, un ton qu'il va garder durant quasiment toute la première demi-heure et qui pourra jeter le trouble et inquiéter celui qui désirait voir un véritable thriller, sombre, tragique. Narizzano joue la carte de l'humour pour mieux jeter les bases de son histoire. La jeune et très séduisante Patricia ne prend guère au sérieux les étonnantes manies de la vieille Mme Trefoile qu'elle prend plus pour une pieuse excentrique que pour une dangereuse psychopathe. En découlent de savoureuses séquences toutes plus drôles les unes que les autres (l'absence de miroir, le rouge à lèvres, la garde-robe inappropriée, la lecture de la Bible jusqu'à l'épuisement, les aliments servis...) mais qui
derrière leur drôlerie, leur légèreté annoncent dans un certain sens le calvaire qui attend la pauvre femme. Tous les détails ont leur importance aussi joyeux soient ils et c'est là une des clés de la réussite du film. Avoir su amener l'horreur de l'intrigue avec cet humour, cette légèreté sans jamais sombrer dans le ridicule ou la facilité. faire rire tout en faisant peur n'est jamais un exercice facile que Narizzano réussit pourtant à accomplir avec un certain brio. Et lorsque Carroll réalise ce qui se passe réellement il est trop tard. La voilà prisonnière d'une vieille femme aigrie, une fanatique religieuse qui ne vit qu'à travers Dieu et qui n'est jamais parvenue à surmonter la mort de son fils adoré.
C'est l'affrontement entre ces deux femmes auquel on va assister, celui de Patricia, jeune fille moderne, coquette qui va bientôt se marier à son nouveau fiancé, et d'une femme meurtrie, obsédée, rongée par un passé coupable qu'on devine à travers quelques éléments disséminés ça et là, un douloureux passé qui la conduit à se transformer en dévote recluse dans sa demeure. Patricia est tout ce qu'elle déteste et jamais elle n'aurait pu imaginer que son fils chéri ait pu envisager un jour de l'épouser. Elle se donne donc pour mission de purifier cette âme souillée afin que son cher garçon trouve la paix par delà la mort même si cela l'oblige à la retenir en otage. Mme Trefoile pourrait être l'ancêtre de la mère de Carrie,
l'humour (noir, très noir) en plus. Bien sûr on devine assez facilement le final, disons le tragique, qui ne réserve aucune surprise mais l'ensemble est si bien mené que ce thriller très "british" passe comme une lettre à la poste.
Die! Die! My darling doit bien évidemment beaucoup au duo que forment la très jolie Stefanie Powers, qui connaitra la gloire mondiale quinze ans plus tard avec la fameuse série Pour l'amour du risque, et l'incroyable Tallulah Bankhead, actrice hollywoodienne dont ce sera le dernier grand rôle. Délicieuse, Stefanie apporte la petite note d'humour et d'innocence à son rôle en sachant très bien doser comédie, tragédie et horreur. Quant à Tallulah elle est tout
bonnement parfaite en vieille dame pieuse rongée par la douleur et les affres du passé. Aussi ignoble qu'elle peut être touchante, elle laisse ici une dernière fois éclater tout son talent d'actrice, un effort d'autant plus remarquable que Tallulah était bien malade lors du tournage qu'elle faillit d'ailleurs ne pas terminer.
Aux cotés de ce parfait tandem on saluera la prestation de Yootha Joyce, la servante implacable, déchirée entre sa fidélité pour Mme Trefoile et le dégout, la peur qu'elle lui inspire. Peter Vaughan, grand acteur de télévision est son mari, obsédé sexuel. La petite
touche de curiosité vient ici du fait de la présence de Donald Sutherland dans la peau du fils attardé de la servante.
Toujours au crédit du film ses très beaux décors fort joliment mis en valeur par une excellente photographie. Ainsi la petite demeure délabrée très anglaise de Mme Trefoile se mue t-elle assez vite en une sorte de petit manoir avec ses portraits et pièces secrètes où errent les fantômes du passé, le jardin de la villa se transforme quant à lui en un mini bois dont on ne peut soudainement plus s'échapper et le petit lac devient une sorte de marécage... ou comment faire d'un environnement moderne un décor très Hammerien aux réminiscences
gothiques avec ce que tout cela sous-entend.
Die! Die! My darling est une production Hammer malheureusement méconnue qui pourtant mérite fortement d'être (re)découverte par tout amateur de bons thrillers à l'anglaise. Sous couvert d'une comédie horrifique noire se cache un excellent petit film d'atmosphère sur la folie et les délires d'une vieille femme qui a voué sa vie à Dieu. S'il peut paraitre simple, la simplicité avouons le a parfois du bon, même du très bon.