Perversion en el paraiso
Autres titres:
Réal: Jaime J. Puig
Année: 1982
Origine: Espagne
Genre: Erotique
Durée: 67mn
Acteurs: Andrea Albani, Pep Corominas, Joaquin Gomez, Barbara Ben, Jennifer James, Javier de La Cima
Résumé: Au Paradis Adam et Eve folâtrent innocemment au coeur des forêts et des prés. Satan qui a l'intention d'ouvrir un bordel pour peupler la Terre va tenter de débaucher Eve, Adam n'ayant que peu d'intérêt pour le sexe. Ils croquent la pomme et se retrouvent dans la grotte de Satan. Malgré la tentation Adam n'a aucune pulsion sexuelle. Il est jeté hors de la grotte. Satan essaie d'exciter Eve mais elle est frigide. Une bonne séance sadomasochiste va résoudre le problème. Eve devient une vraie femme, dominante et sûre d'elle au grand dam de la compagne du Diable...
En 1982 l'Italie nous livre une étonnante version de la genèse dans laquelle on pouvait découvrir Adam et Eve tel qu'on ne les avait encore jamais vu. Sous les traits d'Adam l'incomparable Mark Gregory, inoubliable Guerrier du Bronx et surement un des meilleurs si ce n'est le meilleur Rambo transalpin que l'Italie ait connu, déambulait nu au Paradis, rongé par la solitude, jusqu'au jour où Dieu donna vie à une silhouette féminine qu'Adam avait une nuit dessiné sur le sable. Adam découvrit alors les plaisirs du sexe. Après que Eve ait croqué la pomme Dieu les punit en les envoyant sur terre au beau milieu de tribus d'hommes
préhistoriques cannibales. Signé Luigi Russo Adamo ed Eva la prima storia d'amore reste à ce jour un véritable petit plaisir coupable, totalement anachronique, un peu fou, un délire biblique totalement jouissif comme seule l'exploitation transalpine pouvait imaginer. La même année l'Espagne nous offre une autre vision du Paradis, bien plus érotique cette fois mais tout aussi hérétique voire bien plus, avec Perversion en el paraiso réalisé par Jaime. J. Puig, petit tâcheron ibérique à qui on doit quelques extravagantes et miséreuses pellicules erotico-pornos telles que Una virgen para Caligula, Messaline et Agrippine avec Ajita Wilson et sa pseudo suite Bacanales romanas 2.
Le Paradis à l'aube des temps. Adam est un jeune homme insouciant qui ne pense jamais au sexe. Eve semble un peu plus mature. Tout deux folâtrent dans les bois, baguenaudent dans les champs pendant que Satan / Ivan tente de peupler la terre en ouvrant un bordel sur Terre avec l'aide de sa brulante partenaire Odil et leurs deux servants. Lorsque Eve croque la pomme et la propose à Adam Ivan et Odil se mettent à copuler dans un pré. Eve est troublée et se demande ce qu'ils font. Le couple diabolique est tout à fait conscient qu'il est observé, une manière d'attiser les sens d'Adam et Eve qui se sauvent. Quelque temps plus tard ils pénètrent dans une grotte ignorant qu'il s'agit de l'antre du Diable. Ils sont accueillis par le
couple qui leur offre un lit mais rien ne se passe. Adam n'a aucun intérêt pour le sexe. Ivan retient Eve prisonnière bien décidé à la débaucher. Adam est jeté hors de la grotte. Désormais seul il se morfond. Pendant ce temps Satan essaie d'exciter Eve mais sa tentative est vaine. Vexé dans sa fierté d'homme Satan passe alors à la vitesse supérieure déterminé à faire de Eve une vraie putain. Pour se faire il a recours à une séance de flagellation qui a pour but de libérer Eve de sa frigidité. Cela fonctionne. Eve devient une vraie femme qui ose même dominer le maitre, une amante redoutable qui fait de l'ombre à Odil qui part alors séduire Adam dans la forêt après s'être masturbée en épiant les ébats d'Ivan.
Adam part ensuite pour la grotte à la recherche d'Eve. Il tombe sur Ivan qui, très excité par ses fesses, le sodomise. Eve intervient à cet instant. Vexée par ce qu'elle voit elle s'enfuit. Adam abandonne Ivan et la rejoint. Désormais sexuellement épanouis ils peuvent s'aimer et faire l'amour.
Comme l'indique la voix solennelle du narrateur (Satan lui même qui nous explique comment furent crées l'érection, l'éjaculation et l'orgasme sous l'oeil réjoui d'Eve) lors de l'ouverture du film Perversion en el paraiso est une farce hérético-paillarde qui à sa manière détourne la genèse pour en faire une fable érotique idiote mais non dépourvue de charme malgré
l'absence évidente de tout budget. A l'instar des autres films du réalisateur ce gag biblique prêche avant tout par son coté miséreux. Si Luigi Russo avait tourné Adamo ed Eva en partie dans un joli jardin botanique et sur le splendide Mont Gelato Jaime J. Puig a quant à lui posé sa caméra dans un pauvre petit bois aux abords de Barcelone et de Gerone non pas aux beaux jours mais en fin d'hiver! Le paradis a donc un air de nature morte et froide d'où ce sentiment de pitié qui envahit le spectateur lorsqu'il voit Adam et Eve gambader nus dans ce décor hivernal, s'ébattre dans des ruisseaux dont l'eau doit être glaciale. Courageux sont-ils d'autant plus qu'ils doivent simuler le bonheur. C'est en tout cas une autre vision qu'on a du
Paradis. A aucun moment on a donc l'impression d'être au jardin d'Eden! A cette campagne boisée nue s'ajoute le décor de la grotte, un misérable coin de studio aménagé dissimulé par un drap et garni d'objets hétéroclites bas de gamme franchement... étranges. Et c'est bien ironiquement de cette étrangeté que provient le coté fascinant de cette production à micro budget. Nous sommes au paradis mais c'est dans un décor pseudo psychédélique que vivent Satan et sa maitresse. Lumières rouges, roses, bleues, couleurs flashy (Argento sort de cette pellicule), voiles et tentures diaphanes, masque vénitien ou de tragédies grecques, alambics et cornues, fumigènes, chaudrons... se mélangent à des objets grecs ou
romains, miroirs-soleil... et même des colombes sorties de nulle part qui viennent se poser sur Eve après qu'elle ait été flagellée (une scène qui semble avoir été improvisée au gré du bon vouloir des oiseaux). Les deux serviteurs de Satan sont vêtus comme des esclaves romains. Le kitsch est à l'honneur, on ne peut qu'aimer! Notons qu'on retrouve de tels anachronismes dans Messaline et Agrippine qui reprend aussi le concept de la voix-off. Il va sans dire que ce décor a servi aux deux deux films. L'ensemble est rythmé par une étrange musique tour à tour étrange, envoutante, lyrique mais également psychédélique.
C'est donc dans ces décors inattendus que Satan/Ivan va tenter de débaucher Eve, de faire
son initiation sexuelle, principale source d'intérêt du film même si on reste dans le soft. On retiendra surtout du film la longue et brulante masturbation de Odil, seule sur son lit, alors qu'elle observe derrière par un trou percé dans le mur les ébats d'Eve et Ivan. Outre une pléthore de nus tant frontaux (uniquement féminin) que dorsaux, on retiendra une scène de flagellation destinée à désinhiber Eve, les ébats ludiques et très nature d'Adam et Eve dans les feuilles mortes et ruisseaux. Très drôle est la séquence où Satan, admiratif et très excité face au divin fessier d'Adam le sodomise après cette inoubliable réplique: "Quel magnifique petit cul!" (On confirme). Et lorsque Eve les surprend inoubliable aussi est sa réaction: "Eh
bien je vois que ton cul fonctionne, lui!" Tout aussi drôle est la transformation d'Eve qui après son initiation sexuelle réussie (la flagellation ça marche toujours) devient une véritable dominante, une femme libérée, féministe qui met Satan à ses pieds, le fouette pendant qu'il prend Odil ou comment le Diable est devenu un homme soumis mais heureux.
L'interprétation vaut qu'on s'y attarde un tant soit peu. Eve n'est autre que la jeune et peu expressive Andrea Albani, starlette de l'érotisme ibérique vue dans moult productions coquines (Orgasmo caliente, Blanche Neige et les sept sadiques, Una virgen para Caligula, Les orgies d'une vierge) avant sa tragique disparition à tout juste 34 ans due à une
méningite foudroyante. Adam prend les traits du divin Pep Corominas, future égérie gay découvert chez Eloy De La Iglesia (Navajeros) qui alternera par la suite sexploitations où il joue de sa bisexualité (Erotic family où il se fait faire une fellation non simulée, Porno: situation limit, Neumonia erotica y pasota, En busca del polvo perdido, Les vies de Loulou...) et films plus généralistes (Sahara et surtout le magnifique et cruel El aire de un crimen...). Difficile de ne point succomber à la tentation face à la juvénilité d'un tel Adam dont on admirera la fine silhouette et le splendide fessier. Dommage qu'à aucun moment on n'aperçoive ici l'objet du péché judicieusement camouflé sous un pagne ou par quelque objet
toujours bien placé. Entre Pep et Mark Gregory le choix est compliqué. Difficile de choisir avec qui croquer la pomme. Satan est interprété par Joaquin Gomez, comédien venu de la télévision qui connaitra un temps une carrière érotique avant de se tourner définitivement vers le petit écran. Il est également la voix du narrateur. C'est l'opulente blonde platine Barbara Ben qui se glisse dans la jupette romaine de sa maitresse. On remarquera l'érection bien visible de Javier de Cima (le serviteur masculin) lorsqu'il fait l'amour à la servante noire (Jennifer James, la touche exotique).
Véritable petite curiosité ibérique pleine de drôlerie, de bonne humeur Perverso en el paraiso est une comédie érotique biblique totalement farfelue certes d'une absolue pauvreté mais suffisamment enlevée, pétillante et joliment osée pour retenir l'attention de l'amateur de pellicules au joyeux gout païen. Et la présence de Pep Corominas en tenue d'Adam (c'est le cas de le dire) n'est jamais qu'une autre bonne raison de s'émerveiller, l'esprit envahi de pensées impures. Si certains croquent la pomme d'autres ne rêvent que bouffer un divin cul.
Que Dieu nous pardonne. Mais comme le dit la voix-off en fin de bande: Maintenant que les hommes ont découvert le péché de chair pas même une bombe à neutrons ne pourra les arrêter de copuler.
Bien oubliée aujourd'hui Perversion en el paraiso n'a jamais fait l'objet d'édition numérique. A ce jour cette farce biblique demeure visible uniquement via une vieille édition vidéo espagnole, un joli petit Graal pour tous les collectionneurs de bizarreries et autres coquineries salaces.