Il cinico, l'infame, il violento
Autres titres: Le cynique l'infâme le violent / The cinic, the rat and the fist
Real: Umberto Lenzi
Année: 1977
Origine: Italie
Genre: Polizesco
Durée: 94mn
Acteurs: Maurizio Merli, Tomas Milian, John Saxon, Renzo Palmer, Gabriella Lepori, Bruno Corazzari, Guido Alberti, Gianni Musy, Riccardo Garrone, Claudio Undari, Marco Guglielmi, Gabriella Giorgelli, Aldo Massasso, Brigitte Petronio, Gianfilippo Carcano, Dante Cleri, Claudio Nicastro, Massimo Bonetti, Piero Tiberi, Franco Odoardi, Salvatore Billa, Rosario Borelli, Tommaso Palladino, Benito Pacifico, Franco Marino, Fulvio Mingozzi, Ermelinda De Felice, Fortunato Arena, Ennio Antonelli, Sisto Brunetti, Omero Capanna, Nestore Cavaricci, Costantino Carrozza, Domenico Cianfriglia, Rocco Lerro, Alba Maiolini, Riccardo Petrazzi, Renzo Pevarello, Claudio Ruffini, Sergio Smacchi, Sergio Testori...
Résumé: Alors qu'il vient tout juste de prendre sa retraite l'inspecteur Tanzi apprend que Luigi Maietto dit le Chinois vient de s'évader de prison. La première cible de Maietto est Tanzi qui autrefois l'a fait arrêter et condamner. Il envoie un homme de main le tuer. Ce dernier le rate et le laisse pour mort. Le supérieur de Tanzi accepte qu'il se fasse passer pour mort afin de mieux pouvoir l'arrêter. Il ignore encore que Maietto s'est associé à un boss de la mafia new-yorkaise, Di Maggio, Tanzi a alors l'idée de monter le clan de Di Maggio et celui du Chinois l'un contre l'autre afin qu'ils se déclarent une guerre sans merci...
Huitième polizesco d'une série de dix débutée en 1973 avec Milano rovente / La guerre des gangs Il cinico l'infame il violento marque la troisième collaboration du réalisateur Umberto Lenzi avec l'ineffable Maurizio Merli qui endosse à nouveau la peau du commissaire Tanzi à qui il avait déjà donné vie dans le précédent Roma a mano armata / Brigade spéciale. Après déjà presque quatre années de bons et loyaux services dans le genre Lenzi, qui en fut un des pères fondateurs avec notamment Fernando Di Leo et Sergio Martino, semble donner quelques signes de faiblesse même si ce nouveau polar à l'italienne demeure une petite
bande d'honnête facture.
Le commissaire Leonardo Tanzi vient de démissionner des forces de police et compte mener désormais une vie paisible en écrivant des romans policier. Ses aspirations sont rapidement contrariées lorsqu'on lui apprend qu'un dangereux truand qu'il a autrefois arrêté, l'ambitieux Luigi Maietto surnommé Le chinois, vient de s'évader de prison et compte bien se venger de celui qui l'y a envoyé. Maietto ordonne à deux hommes de tuer Tanzi mais l'ex-commissaire échappe de justesse à leurs balles. En accord avec sa hiérarchie Tanzi se fait passer pour mort afin de remonter tranquillement jusqu'à Maietto et le tuer une fois pour
toute. Pensant être débarrassé de Tanzi Le chinois, tapi à Rome, s'est associé à un parrain de la mafia new-yorkaise, Di Maggio, qui dirige un racket de protection. Tanzi va monter un plan machiavélique. Il veut monter Le chinois contre Di Maggio afin de l'anéantir une fois pour toute. Les clans des deux truands se déclarent alors une guerre sans merci dont Tanzi tire les ficelles.
Le cynique l'infâme le violent n'est peut être pas le meilleur polizesco de son auteur ni même le plus brutal, ni le plus musclé. Au contexte d'une Italie alors plongée dans un climat social et politique particulièrement sombre, crépusculaire, le scénariste Ernesto Gastaldi
secondé par Sauro Scavolini a largement préféré ici s'attacher à définir, peaufiner ses personnages tentant l'esquisse d'un polar un peu plus psychologique que les oeuvres précédentes du cinéaste au détriment même de l'action. La tentative est louable, s'avère plus ou moins réussie mais n'est ce pas de là qu'une petite sensation d'ennui provient de temps à autre? Point de courses-poursuites vraiment effrénées, de règlements de compte aussi gratuits soient-ils, d'effusion de sang, de violence exacerbée pas même cette surabondance de misogynie qu'on aime, une des caractéristiques du réalisateur (si ce n'est un bon coup de poing dans le visage de Gabriella Lepori, un petit régal, et Gabriella Gorgelli vitriolée). Ce
huitième polizesco de Lenzi est par contre plus complexe que d'habitude et beaucoup moins noir. Il se veut plus sérieux, plus solide, plus calme également. Cela lui fait malheureusement perdre ce qui faisait l'essence même du cinéma de Lenzi, (du cinéma Bis en général?) son coté explosif, jubilatoire, irrévérencieux. De quoi décevoir cette fois ceux qui de Lenzi espéraient une fois de plus un polar coup de poing.
Le cynique l'infâme le violent est pourtant loin d'être un film d'importance mineure encore moins inintéressant. A son crédit outre l'efficace partition musicale signée Franco Micalizzi, l'impeccable mise en scène du cinéaste visiblement en parfaite forme. Fluide, sans temps
mort, parfaitement rythmée elle met de surcroit en valeur le jeu des trois acteurs principaux à savoir Maurizio Merli (l'infâme), Tomas Milian (le cynique), et John Saxon (le violent), trois stars du genre que Lenzi est parvenu à réunir pour la plus grande joie du spectateur même si on pourra être un peu déçu par certains dans l'interprétation de leur rôle. Merli, égal à lui même, incarne toujours cette justice expéditive avec le stoïcisme qu'on lui connait arrosé ici d'une bonne dose d'humour, d'auto-dérision diraient certains. On a simplement connu Merli plus à l'aise. Car force est de constater que la réflexion n'est pas sa tasse de thé. Bourrin, il joue à l'instinct ce qui n'est visiblement pas l'objectif de son personnage tel que Gastaldi l'a
dessiné. Quant à Milian loin de ses interprétations du Bossu, de Monnezza et Nico Giraldi il est cette fois tout en nuances, étrangement calme, nonchalant, presque effacé dans sa composition du Chinois, un être hypocrite, odieux, un parrain en devenir, dont on savourera par contre les dialogues souvent incisifs. John Saxon gros bonnet classieux de la mafia new-yorkaise arriverait presque à leur voler la vedette par la subtilité de son jeu et par sa cruauté et son sadisme. C'est à lui qu'on doit quelques scènes désormais culte telle celle où après avoir écartelé un traitre, il s'en sert de cible pour jouer au golf puis le donne en pâture à ses deux bulldogs. Malgré la présence au générique de ses trois poids lourds ce n'est
pourtant pas à eux à qui on doit les principales scènes d'action, les trois comédiens ne se rencontrant pas énormément durant le métrage, mais à toute une cohorte de seconds rôles incarnés par de solides gueules du Bis transalpin menées par le brutal Claudio Undari: Bruno Corazzari, Guido Alberti, Salvatore Billa, Gianni Musy, Renzo Palmer pour n'en citer que quelques uns. Ce n'est que lors du final que Lenzi réunit enfin Milian, Merli et Saxon, une conclusion malheureusement hâtive, un brin bâclée donc frustrante, expédiée en quelques minutes qui gâche le plaisir de cette réunion au sommet.
Selon le coté de la lorgnette par lequel on le regarde Le cynique l'infâme le violent décevra
ou ravira le spectateur, plus précisément l' inconditionnel du cinéaste. Son coté calme et psychologique en enjouera certains, pas assez détonnant il en frustrera d'autres. Chacun le jugera donc à sa manière. Mais de façon générale il reste un honnête polizesco, certes pas très original dans son scénario, dont on retiendra essentiellement le jeu de John Saxon et quelques scènes aujourd'hui passées à la postérité.
Umberto Lenzi signera l'année suivante La banda del gobbo / Echec au gang qui marque non seulement le déclin du réalisateur dans ce style spécifique (malgré une composition de Tomas Milian qui pour la première fois joue dans le même film les personnages du Bossu et de Monnezza) mais également le déclin de manière plus générale du polizesco avant qu'il n'en termine définitivement avec le polar en livrant un dixième opus en 1979 encore plus faiblard De Corleone à Brooklyn, un chant du cygne décevant. Il se consacrera alors au film cannibale et à l'horreur pure et simple made in 80s.