Milano il clan dei calabresi
Autres titres: The last desperate hours
Real: Giorgio Stegani
Année: 1974
Origine: Italie
Genre: Polar
Durée: 92mn
Acteurs: Antonio Sabato, Silvia Monti, Pier Paolo Capponi, Nicoletta Rizzi, Fred Williams, Mario Donen, Toni Ucci, Peter Carsten, Melù Valente, Giulio Baraghini, Bruno Di Luia, Nando Marineo, Mirella Rossi, Nicola D'Eramo, Elena De Merick, Salvatore Carrara, Nestore Cavaricci, Francesco D'Adda, Pasquale Fasciano, Lina Franchi, Silvio Klein, Alba Maiolini, Nando Sarlo, Luciano Zanussi...
Résumé: A la tête d'un réseau de prostitution le calabrais Paolo Mancuso s'est imposé dans le milieu milanais. Suite à un différend avec un gang rival il est maintenant traqué par ses ennemis qui veulent sa mort. Une nuit afin d'échapper à une tentative d'assassinat il se réfugie dans un laboratoire où sont pratiquées des expériences sur des rats. Il se fait mordre par l'un d'eux. Il est désormais porteur d'un virus mortel. Il n'a plus que 24 heures devant lui pour régler ses comptes...
Plus connu comme scénariste (Le moulin des supplices notamment) que comme metteur en scène Giorgio Stegani a réalisé une petite dizaine de films entre 1964 et 1977 dont quelques westerns, un teensploitation solaire Il sole nella pelle / Passions juvéniles / Le soleil dans la peau, un des premiers films d'une Ornella Muti encore mineure, et ce polar noir plutôt curieux qui en fait mélange deux genres, le film mafieux traditionnel et le film de contamination.
D'origine calabraise Paolo Mancuso s'est installé à Milan pour tenter de faire fortune. Il n'a malheureusement pu faire sa place que dans le milieu de la prostitution et du trafic de
drogues. Suite à une affaire qui a mal tourné il tombe dans un guet-apens que lui a tendu par une bande rivale dirigée par Dario Lippi. Poursuivi par les hommes de Lippi il se réfugie dans un laboratoire où sont pratiquées des expériences sur des rats souris. L'un d'entre eux mord Mancuso à la main. Il ignore qu'il est désormais porteur d'un virus mortel. Il ne lui reste que 24 heures avant que les premiers effets ne se produisent et qu'il ne devienne contagieux. Les premiers signes seront d'importantes sudations, des maux têtes violents, la nuque se raidira puis viendra l'agonie. Un inspecteur de police se met à sa recherche afin d'éviter qu'il ne contamine toute la ville. De son coté Mancuso va éliminer un à un ses rivaux. Il
va devoir également tuer ses propres hommes qui se sont tous retournés contre lui sur ordre de son bras droit, Gino, qui a toujours voulu prendre sa place. Dans cette course contre la montre où Mancuso est totalement seul il ne lui reste qu'une unique personne en qui il peut avoir confiance et peut l'aider: son ex-femme Lidia.
Surprenant polar qui commence comme un pur noir mafieux dans les milieux de la prostitution milanaise. L'ouverture le ton mais elle est également trompeuse. Alors que défile le générique on assiste au viol d'une adolescente par une bande de petits gangsters à la périphérie de Milan, un viol brutal le genre a si souvent su nous en offrir. Puis c'est au tout
d'une autre putain de se faire rosser tandis que son maquereau se fait sauvagement tué sous ses yeux. Voilà une mise en bouche alléchante et un moyen très efficace de présenter au public deux bandes rivales, d'un coté celle de Paolo Mancuso, immigré calabrais venu s'enrichir à Milan mais n'ayant seulement réussi qu'à être un nom dans le milieu de la drogue et de la prostitution, de l'autre celle de Dario Lippi aussi séduisant qu'impitoyable. Durant les trente premières minutes on évolue dans les univers sombres de la prostitution, des règlements de comptes, reflet brutal du mal de vivre des calabrais aux abords d'une Milan industrielle envahie de marginaux de toutes sortes, clochards, voyous, putes. Stegani
n'y va pas avec le dos de la cuiller et donne dans la plus pure exploitation en multipliant punitions et meurtres violents souvent gratuits mais spectaculaires entre autres une lapidation, un égorgement au bistouri, un meurtre à la perceuse, des passages à tabac sans oublier la catin attachée au lit puis brulée vive. Suite à la morsure d'un rat de laboratoire porteur d'un virus mortel Milano il clan dei calabresi va progressivement changer d'orientation. C'est la chute d'un homme qui encore hier était un puissant maquereau à laquelle on assiste, un homme seul contre tous qui va devoir lutter pour rester en vie. Il s'agit en fait d'un double combat, rester en vie pour éliminer ses ennemis avant qu'ils ne le tuent et
surtout résister au virus qui lentement va le tuer. Il n'a que 24 heures devant lui. C'est désormais une course contre la montre. Du noir mafieux le film passe au film de contagion et le mafieux cruel, le personnage négatif devient un homme presque positif, une bête traquée qu'on arriverait à plaindre, un homme qui cependant n'a rien perdu de son inflexibilité et de sa détermination lorsqu'il s'agit de se venger de ceux qui l'ont trahi jusqu'au final dramatique dans le bidonville aux portes de Milan. Cet épilogue tragique rappellera à certains celui de Miracle à Milan de Vittorio De Sica mais dans sa version négative, Stegani brisant ici le mythe du rêve établi par le grand réalisateur.
Le mélange de ces deux genres est une première dans l'histoire du polar italien. Il en fait un film unique donc intéressant même si unique ne signifie forcément réussi. L'idée est singulière, l'intrigue plutôt captivante, la violence graphique est un des gros atouts de cette pellicule tout comme l'interprétation. Le problème vient de la mise en scène elle même. Stegani est un très bon scénariste mais il est beaucoup moins adroit avec une caméra qu'avec qu'un stylo. La réalisation certes personnelle est par instant un peu trop mollassonne, sans grande énergie. Certaines scènes en souffrent comme cette course-poursuite peu impressionnante car poussive comme souffre le film d'un rythme en dents de
scie heureusement vitalisé par les scènes d'action et de violence.
Quant au message social, la condition des immigrés calabrais, trop peu développé, il reste à l'état embryonnaire ce qui est là encore dommage car il aurait pu donner à l'ensemble un coté social très intéressant.
L'interprétation fort heureusement fait quelque peu oublier ces défauts. Antonio Sabato, sombre, déchu, est un Paolo Mancuso déterminé à vivre et à se battre jusqu'au bout pour remporter cette course contre la montre afin de régler ses comptes et de ne pas crever comme un chien, seul, pour reprendre une de ses répliques. A ses cotés on saluera la
prestation de Silva Monti qui mettra un terme à sa carrière cinématographique après cet ultime rôle et surtout celle de Nicoletta Rizzi, plus expressive que jamais, remarquable, intense, dramatique, dans la peau de l'ex-épouse de Mancuso. Elle donne au film lors de ses quelques apparitions et surtout au final un ton tragique particulièrement touchant. Parmi les seconds rôles on notera la performance de Mario Donen, générique qui trouve ici un de ses rôles les plus étoffés de sa carrière, et celle de Tony Ucci en clochard. Pier Paolo Capponi endosse l'imperméable de l'inspecteur de police à l'ancienne bien plus porté sur le social que la plupart de ses confrères. Le regretté Nicola D'Eramo est le travesti, un rôle qui
lui sera dés lors régulièrement attribué dans le polizesco et la comédie.
Totalement inédit en France Milano il clan dei calabresi malgré son approximation et son intrigue pas assez fouillée est un polar noir hybride qui mérite l'attention de l'amateur non seulement pour sa singularité scénaristique mais également pour son coté exploitatif qui plaira aux inconditionnels de violence gratuite, son atmosphère désespérée aux limites par instant du morbide et son final sombre, un no happy end touchant qui tue les personnages souvent forts que Sabato a régulièrement interprété.
Une curiosité située entre un Fernando Di Leo et un Umberto Lenzi à conseiller à l'amateur qui ne la confondra évidemment pas avec Le clan des calabrais / Il trucido e lo sbirro de Umberto Lenzi.