La noche de la furia
Autres titres: Cop-in
Real: Carlos Aured
Année: 1974
Origine: Espagne
Genre: Thriller
Durée: 90mn
Acteurs: Maria Perschy, Glenn Lee, Eduardo Bea, Alibe, Blanca Estrada, Julian Uguarte, Manuel Calvo, José Luis Chinchilla, Juan Sala, José Jaspe, Francisco Nieto, Erasmo Pascual, Juan Antonio Soler...
Résumé: Trant, un policier doit s'infiltrer dans un réseau de faussaire dont le chef, Parry, est un ancien ami à lui. Il feint un accident de voiture pour qu'il héberge. Parry ne se doute pas des nouvelles activités de Trant. malheureusement un groupe de voyous surgit et prend la villa et ses occupants en otages. Commence alors pour Trant et les occupants une longue nuit de violence...
Réalisateur scénariste assistant metteur en scène Carlos Aured fait définitivement partie des noms incontournables de l'exploitation espagnole même si en France peu de ses oeuvres nous sont parvenues. Essentiellement connu pour ses pellicules érotiques voire pornographiques qu'il signa dés le début des années 80 Aured a réalisé durant la décennie précédente quelques petites pellicules d'horreur non dépourvues de charme ainsi que giallo Los ojos azules de la muneca rota. La noche de la furia fut tourné la même année que ce thriller, son avant dernier film en fait avant justement sa période érotique.
Un policier américain, Trant, doit infiltrer incognito un groupe de faussaires dont le chef semble être un de ses anciens compagnons du Vietnam Parry, aujourd'hui impresario d'une actrice déchue, Jill Berger. Jill et Parry vivent dans une grande villa isolée quelque part au bord de la mer. Alors qu'il se rend chez Jill Trant se fait non seulement poursuivre par quatre petits voyous, Sue, Martha, Kitt et Hall, qu'il parvient à semer mais il a aussi maille à partir avec le shérif du comté qu'il blesse lors d'un affrontement. Blessé le shérif apprend la véritable identité de Trant et doit collaborer avec lui. Avant son arrivée à la villa de Jill Trant feint d'avoir un accident de voiture afin de mieux être recueilli et soigné par le couple. Parry lui
offre tout naturellement l'hospitalité ignorant tout des intentions de son vieil ami. Jill est vite séduite par Trant avec qui elle couche. Les plans du policier vont être contrariés par l'arrivée des voyous qui l'avaient poursuivi sur la route quelques temps plus tôt. Ils ont en effet reconnu sa voiture et sont bien décidés à s'amuser. Déchainés, ils pénètrent dans la villa et prennent ses occupants en otages. Lors d'un jeu ils tuent involontairement l'assistant du shérif venu à la demeure. Une longue nuit de terreur commence alors pour les otages à la merci des voyous. Lorsqu'un d'entre eux découvre un énorme sac de billets caché dans un grenier ils veulent à tout prix savoir d'où vient l'argent. Ils tuent Jill après l'avoir violé. Trant
parvient à s'évader avec Sue, désireuse de quitter ses compagnons, mais elle est à son tour tuée. Trant réussit à tuer les voyous, libère Parry qui à son tour le fait prisonnier, bien décidé à ne pas le laisser partir puisque par la force des choses il a découvert ses activités frauduleuses. Il l'emmène dans son repaire. Trant maitrise Parry au moment où la police arrive à la demeure.
Ainsi couchée sur le papier l'intrigue semble être des plus prometteuse. Une fois à l'écran les choses sont bien différentes. La noche de la furia s'inscrit dans le riche filon des films de séquestration que des films tels que La dernière maison sur la gauche, La settima donna ou encore La maison au fond du parc pour n'en citer que trois ont à jamais rendu célèbre.
Rien de très original ici si ce n'est que Aured mélange en fait trois styles qu'il a bien du mal à emboiter de manière logique. S'ensuit donc un film décousu, incohérent, sans queue ni tête qui provoque plus l'hilarité qu'un sentiment de malaise. La noche de la furia peut se scinder en trois parties distinctes. La première, très certainement la plus brouillonne et la moins réussie, peut laisser pantois par son absurdité. Le film s'ouvre sur Trant sillonnant les routes américaines à bord de sa voiture soudainement prise en chasse par quatre voyous qui lui tirent dessus. Il parvient à les semer, s'arrête dans un petit comté où apparemment le shérif et son adjoint n'aiment pas beaucoup les étrangers.
On le questionne, on le relâche, on le suit. Rien n'a vraiment de sens. les personnages sont idiots à l'image même des situations entrecoupées par les déboires d'un couple de jeunes mariés (un septuagénaire sosie de Popeye et une jeune et volcanique brune qui ne pense qu'au sexe) partis à la pêche qui n'a strictement aucune utilité dans le scénario. Trant tue le shérif qui finalement ne meurt pas puisqu'il s'agit de balles à blanc. Apparait le chef du FBI qui lui explique que Trant est un agent infiltré en mission chargé de démanteler un réseau de faussaires. Tout est abracadabrant, assez mal ficelé, jamais crédible et mal joué dans cette
première partie sous le signe du polar (de la parodie serait plus juste) où il ne se passe pratiquement rien. On s'ennuie ferme, on rit par la bêtise de cet enchainement de péripéties idiotes quand débute la seconde partie, la plus intéressante.
Les voyous refont enfin surface après 40 minutes d'absence, plus déchainés que jamais. Ils n'étaient pas très loin puisqu'on les retrouve près du lieu où Trant a abandonné sa voiture. Voilà qui tombe à pic et leur donne une bonne raison de prendre d'assaut la villa de l'actrice où Trant est hébergé car ils n'ont pas apprécié qu'il leur échappe. Commence alors une prise d'otage dans la règle de l'art avec son lot de violences, d'humiliations et de gratuités
indispensable à tout bon film de séquestration. Dans ce sens La noche de la furia est un pur produit d'exploitation d'une exceptionnelle gratuité justement. Rien absolument rien ne justifie les actes des quatre délinquants qu'on pourra donc autant détester qu'adorer tant ils sont crasses, brutaux et joyeusement déchainés. Aured multiplie les actes de brutalité parmi lesquels on retiendra le double viol et la mort de l'actrice, la scène de l'oiseau (deux morceaux d'anthologie du film), la mise à sac de la villa dans une tempête de plumes, l'ensemble baignant dans un climat de folie, de furie assez bien retranscrit à l'écran grâce au jeu parfait des voyous qui évoluent dans un joli décor estampillé 70s avec lequel le metteur
en scène sait jouer. Ces quelques 30 minutes de séquestration restent un véritable petit délice pour tout amateur d'exploitation, la raison pour laquelle le film mérite d'être vu avant qu'il ne vrille à nouveau dans son ultime quart d'heure en s'orientant cette fois vers le spy movie, le James Bond du très pauvre.
Les voyous éliminés il fallait bien revenir au sujet de départ, nos faussaires. Seul survivant Trant est amené au repaire de Parry, une antre secrète cachée dans les murs de villa qui donne sur une grotte. Parry y a installé tout un équipement digne d'un film d'espionnage façon 60s. Radars, sonars, radios, portes secrètes, hommes-grenouilles. Tout cela fait
sourire puis beaucoup rire lorsque Trant se transforme en karatéka pour se débarrasser des hommes de Parry. Le film se conclura sur un retournement de situation totalement farfelu, une note d'humour qui enfonce le tout. Sue n'est pas morte et Trant lui offre une cigarette alors qu'elle entre dans l'ambulance (il fallait oser!) mais il retrouve surtout Parry afin de profiter lui aussi du magot. Pote un jour, pote pour toujours!
Mis en scène de manière brouillonne, joué sans grande conviction, jamais crédible, La noche de la furia est un produit bâtard qui possédait pourtant une jolie affiche. On y retrouve en effet quelques noms incontournables du cinéma de genre espagnol dont Maria Perschy,
toujours élégante et professionnelle, bien maltraitée ici, Julian Ugarte, Blanca Estrada sans oublier un des spécialistes des rôles de voyous Eduardo Bea, la mulâtresse Alibe et Juan Sala, tous trois excellents en délinquants hystériques. On n'en dira pas autant de l'américain Glen Lee qui semble être venu se perdre ici. Rarement l'avait-on vu aussi inconsistant et peu convaincu. Pour son ultime rôle au cinéma le séduisant play-boy à la mèche rebelle qui fit essentiellement carrière en Espagne offre une prestation bien médiocre, monolithique, jamais crédible dans la peau d'un flic infiltré... ou torturé. (Ah la séance de torture musicale au son du Psyché rock de Michel Colombier, Il fallait y penser comme il fallait oser
l'interpréter aussi mal). Un zéro pointé!
De La noche de la furia on retiendra donc que sa partie centrale, son coté purement exploitatif et gratuit qui fera plaisir aux amateurs de furie perverse et son coté (in)volontairement hilarant, ce coté farfelu qui lui donne l'image d'une farce, d'une parodie hybride. Drôle, distrayant, absurde, un tantinet malsain dans sa partie séquestration voilà une petite série ibérique à découvrir dans la catégorie perversion loufoque d'autant plus qu'elle est inédite et difficilement visionnable.