Forbidden letters
Autres titres:
Real: Arthur J. Bressan Jr
Année: 1976
Origine: USA
Genre: Drame
Durée: 60mn
Acteurs: Richard Locke, Robert Adams, Victoria Young, Willie Boren, David Del Cambio, Douglas Dickinson, Francisco Guevara, John Gustavson, Jerry Kuroda, Ralph Osborn, Thommy Padgett...
Résumé: Un jeune garçon relit les lettres de son amant emprisonné qu'il n'a jamais osé lui envoyer. Cela lui fait revivre les bons moments passés en sa compagnie tant intimes que plus personnels.
Si Arthur J. Bressan Jr est un des pionniers du cinéma porno gay indépendant américain il est cependant loin d'être le plus connu, ses films, soit huit au total, ayant aujourd'hui tous plus ou moins disparu ou été oubliés des éditeurs tant vidéo que DVD. Il n'est pas étonnant qu'ils soient devenus au fil du temps des oeuvres cultes très recherchées des collectionneurs et des amoureux de porno vintage. Après le solaire et très positif Passing strangers, une jolie balade au coeur du San Francisco gay sur fond hippie avec au bout du compte une jolie romance entre deux garçons qui s'aiment, Bressan réalise en 1976 soit
deux ans plus tard Forbidden letters, un film de nouveau tourné en noir et blanc pour se finir en couleur tout aussi positif que le précédent, un élément essentiel du cinéma du jeune cinéaste, un des rares alors à montrer de manière rayonnante l'homosexualité masculine, loin de l'aspect sombre, dur, parfois brutal mis en avant par ses pairs. Pour Bressan l'amour peut exister, être beau et fort entre deux hommes. C'est ce qu'il tente de prouver à nouveau avec ce deuxième long métrage.
L'histoire est très simple pour ne pas dire simpliste. Forbidden letters s'intéresse au jeune Larry, un séduisant garçon d'une vingtaine d'années. Depuis que Richard, son amant, est en
prison il ne sort plus de chez de lui, ne s'amuse plus malgré les tentatives de son amie Iris. Il préfère rester chez lui et relire les lettres qu'il n'a pas jamais osé lui envoyer. Il y décrit leur relation, revit leurs bons moments mais aussi leurs ébats d'une exaltante sensualité. De son coté Richard derrière les barreaux de sa prison imagine que Larry est à ses cotés, qu'il lui fait l'amour. Lorsque Richard est enfin libéré il part retrouver Larry. Les deux amoureux vont ils s'aimer comme autrefois ou les choses auront elles changé?
Outre le positivisme dans lequel baignent ses films un de leurs points communs est qu'ils prennent très souvent en compte le mouvement de libération gay qui débuta aux Etats-Unis au
début des années 70. Passing strangers se concluait au coeur d'une longue marche pacifiste sur Polk street en faveur des homosexuels, une gay pride avant l'heure en plein centre de San Francisco; berceau de l'homosexualité, afin de fêter la libération des moeurs. Bressan venait avec ce film de faire son coming out. Il continue dans le même était d'esprit avec Forbidden letters dont une partie fut tournée à la tristement célèbre Alcatraz. Cette seconde réalisation est plus un film homo-érotique qu'un véritable porno même s'il est agrémenté de jolies scènes hardcore qui illustrent les souvenirs brulants du jeune et innocent Larry et les fantasmes torrides de Richard, macho chaud comme la braise, qui
l'imagine à ses cotés dans sa cellule. Forbidden letters est une oeuvre qu'on pourrait qualifier de quasi intimiste. 55 minutes durant on pénètre l'intimité de ces deux amants, on voyage dans leurs souvenirs, partage leur intimité comme si on lisait nous mêmes ces fameuses lettres. Comme pour Passing strangers Bressan use d'un certain lyrisme, d'un certain onirisme, mélange rêve et réalité, souvenirs et présent, fait preuve d'un sens artistique indéniable. Le film s'ouvre sur la visite des couloirs et cellules d'Alcatraz. Au son d'une musique oppressante l'objectif glisse le long des allées, grimpe les escaliers, l'atmosphère est pesante, suffocante. Elle croise le regard noir de Richard coincé derrière
ses épais barreaux. Se superposent des scènes de masturbation, de fellation, d'éjaculation sur fond d'une cacophonie d''effets sonores où se mêlent soupirs, râles, cris d'extase, de peur, de succion. Tout n'était qu'un rêve. Larry se réveille. Dés lors l'aspect cauchemardesque va laisser la place à la beauté, la poésie. Chacun leur tour les deux amants se rappellent. Le jeune cinéaste fait preuve d'un sens du visuel extraordinaire en filmant avec tendresse et surtout sensualité ces souvenirs comme une suite de tableaux, de peintures, de photographies en mode par instant quasi surréaliste, un aspect renforcé par le noir et blanc. On flirte souvent avec l'expérimental, l'ensemble bercé par une superbe bande-son
composée de mélodies pop acoustique fortement estampillées années 70. On pense parfois aux voix, intonations de Joan Baez, Dylan, Donovan.. Un régal auditif pour tous les amoureux de ce type de variétés hippie. Bressan était exigeant avec les musiques qui accompagnaient ses films. Il aimait avant tout promouvoir les artistes, compositeurs gay. Ce sont eux qui la plupart du temps écrivaient les chansons et thèmes de ses oeuvres. Parmi eux Paul Dunham surnommé Conan, le cousin de l'acteur Richard Locke qui interprète ici Richard.
La partie couleur, peut être un peu plus classique, est tout aussi belle avec ses scènes
d'amour en pleine nature, au bord de la mer ce qui renvoie à Passing strangers. Elle englobe une longue scène presque documentaire sur une fête d'Halloween, celle où sont censés s'être rencontrés Larry et Richard. S'y mélangent travestis, drag-queens et autres invités en costumes horrifiques aussi délirants qu'extravagants. Le final qui voit le retour du noir et blanc apportera la réponse à la question de savoir si les deux amoureux s'aimeront d'un amour toujours aussi fort après leurs timides retrouvailles. Au vu de l'optimisme du réalisateur celle ci est évidente. Assez original est le générique de fin. Point de crédits qui se déroulent en fin de bande mais Bressan lui même qui les récite en voix-off sur fond d'images du film.
Comme pour Passing strangers les scènes de sexe sont filmées avec grand soin, ce sens de l'esthétisme propre ai cinéaste. jamais vulgaires, empreintes d'amour, de tendresse, quasiment similaires à celle de Passing strangers, elles traduisent la force des sentiments des deux amants, par extension la profondeur des amours masculines incarnées par le jeune et androgyne Robert Adams (déjà vedette du film précédent) et Richard Locke, activiste gay acharné, figure symbole de la lutte contre du Sida qui l'emportera en 1996 à 55 ans. Les connaisseurs noteront l'étrange ressemblance de John Gustavson, le photographe
hippie que rencontre Larry sur une plage, avec le chanteur du groupe Uriah heep, David Byron. Une bien gourmande similitude physique reconnaissons le.
Avec Passing strangers Forbidden letters est le film le plus difficilement visible de la filmographie de Arthur J. Bressan, véritable St Graal pour tout collectionneur et passionné de porno gay vintage.