La casa de las palomas
Autres titres: La seduccion / Un solo grande amore / Violation of Laura / House of doves
Real: Claudio Guerin Hill
Année: 1972
Origine: Espagne
Genre: Drame
Durée: 89mn
Acteurs: Lucia Bosé, Luis Dávila, Glen Lee, Ornella Muti, Caterina Boratto, Carmen De Lirio, Concha Goyanes, Blanca Sendino, Juana Azorin, Kiti Manver...
Résumé: Alexandra, une séduisante veuve, voit son amant Fernando revenir dans sa vie après des années d'absence. Sandra, la fille d'Alexandra, tombe sous le charme du bellâtre dont elle s'éprend. Lorsque sa mère découvre que Fernando est un gigolo elle rompt manu militari. Sandra en profite pour le séduire. Ils se voient régulièrement en secret. Fernando lui fera perdre sa virginité. L'adolescente éperdument amoureuse de lui ignore encore que sa mère a toujours des sentiments pour Fernando et tente de le reconquérir...
Venu du documentaire l'espagnol Claudio Guerin Hill n'aura dans sa courte carrière réalisé que deux longs métrages, le désormais célèbre La cloche de l'enfer, petite perle du cinéma fantastique ibérique où il trouva la mort lors de l'ultime jour de tournage, et La casa de las palomas connu en Italie sous le titre Un solo grande amore, un sulfureux drame passionnel qui malheureusement n'a du souffre que l'odeur.
Alexandra vit avec sa fille Sandra, 16 ans, élève dans une école religieuse, dans sa splendide villa lorsque son ex-amant Fernando réapparait après des années d'absence. Si
Sandra n'avait de lui que de vagues souvenirs elle découvre un homme séduisant dont elle tombe immédiatement amoureuse. Fernando et Alexandra qui lui a pardonné leur rupture reprennent leur relation d'avant sous l'oeil de Sandra en proie aux tourments du sexe. C'est alors que surgit Virginia, une femme d'âge mûr qui a été durant leur séparation, l'amante de Fernando. Alexandra ne tolère pas cette liaison avec une femme qui aurait pu être sa mère. Elle le rejette sur le champ, une occasion rêvée pour Sandra de tenter sa chance. Fernando trouve finalement du réconfort auprès de l'adolescente qui ne le laisse pas indifférent. Afin de coucher avec elle il l'emmène chez Virginia, une femme qu'il considère comme une
seconde mère, propriétaire d'une belle villa remplie de colombes. C'est là qu'ils se donneront désormais rendez-vous, à l'abri des regards, c'est là que Sandra perdra sa virginité. Sandra, Folle amoureuse de lui Sandra ignore cependant que les sentiments de sa mère pour Fernando ne se sont pas entièrement éteints. Elle aimerait le reconquérir. Lorsqu'elle découvre leur liaison elle perd la tête. Dans un geste de désespoir elle tente de le reconquérir en lui criant son amour mais Fernando la repousse. L'homme a fait son choix. C'est Sandra qu'il aime. Il ignore encore que l'adolescente les a surpris lorsque sa mère tentait une réconciliation. Désespérée Sandra s'enfuit pour se réfugier chez Virginia. Elle y
massacre toutes les colombes, perd tout contrôle. Lorsque Fernando arrive n'était-il pas trop tard?
Alors qu'en Italie ce type de tragédie à l'érotisme morbide est en plein essor en ce tout début d'années 70 l'Espagne n'est pas en reste pour s'engouffrer dans ce prolifique filon. Tourné fin 1971 le premier film de Claudio Guerin en est un exemple malheureusement bien trop anodin pour marquer les esprits et surtout satisfaire les désirs voyeuristes d'un spectateur avide d'histoires d'amours interdites. L'intrigue est d'une simplicité déconcertante. Le jeune amant d'une attrayante veuve quadragénaire resurgit dans sa vie après une rupture de
plusieurs années. Leur relation renait de ses cendres mais un troisième élément, la propre fille de cette femme, une superbe adolescente en proie aux tourments du sexe, va lentement s'incruster dans cette liaison. Guerin ne fait que reprendre le schéma traditionnel du triangle amoureux sans rien y apporter de nouveau. S'ensuit une histoire vue et revue sans aucune originalité souvent improbable mais surtout ennuyante. Il ne se passe en effet quasiment rien durant les trois premiers quart du film et ce n'est pas l'érotisme qui risque cette fois de sortir le spectateur de sa torpeur, La casa de las palomas est d'une étonnante sagesse, loin, très loin des débordements italiens. Tout le coté extrême de l'intrigue est en fait sur le papier.
Guerin n'en garde que les grandes lignes, suggère plus qu'il ne montre. De quoi frustrer les amateurs de ce genre d'oeuvres pernicieuses.
Opter pour une certaine pudeur n'est pas un mal en soi mais oublier de donner de l'épaisseur à ses principaux protagonistes l'est bien plus. Difficile de s'apitoyer sur le sort des personnages, les aimer, les détester ou même tenter de les comprendre tant le cinéaste a oublié de leur donner une dimension psychologique. Fernando est un jeune gigolo qui profite de son charme que Guerin se contente de filmer le plus possible torse nu, multipliant les gros plans sur son regard et son visage, abusant par instant de ralentis absurdes.
Alexandra est une quadragénaire très proche de sa fille qui retombe dans les bras du séducteur aussi facilement qu'elle le rejette pour ensuite le reconquérir lorsqu'elle s'aperçoit soudain qu'il est sa raison de vivre. Totalement invraisemblable et surtout ridicule ainsi présenté. Quant à Sandra elle est le stéréotype même de la nymphette tourmentée par ses premiers émois sexuels, souhaitant perdre sa virginité dans les bras d'un homme mûr dont elle tombe follement amoureuse dans le sens pathologique du terme. Improbable là encore puisque rien au long du film ne laissait entrevoir une telle réaction. Ce manque de consistance, de matière, d'explications fait de cette Maison aux colombes une oeuvre bien
trop superficielle pour qu'on puisse émotionnellement s'y accrocher.
Le véritable l'intérêt de ce petit film insipide réside en fait ailleurs. Tout d'abord dans la beauté fabuleuse de ses décors magnifiquement mis en valeur par une superbe photographie. Somptueuse villa, jardins féeriques aux senteurs exotiques, piscines ensoleillées, paysages de rêve sans oublier la maison aux colombes très 19ème siècle et ses oiseaux qui l'envahissent ainsi que le final onirique quasi surréaliste, le tout souligné par une partition musicale fort romantique signée Francesco de Masi. Guerin a le sens de l'esthétisme, du visuel et transforme vite cette tragédie passionnelle en une sorte de roman-photo pour
adultes, un conte poétique sulfureux aux réminiscences freudiennes. C'est là le deuxième gros atout du film, son ultime bobine visuellement resplendissante qui voit la défloration de Sandra suivie du drame inéluctable qui frappera la mère et la fille, le massacre des colombes, la folie ambiante. Si l'atmosphère particulièrement morbide des vingt dernières minutes tranche avec le reste du film placé sous le signe du romantisme exacerbé, si ce sursaut dramatique donne enfin au film cette force qui lui faisait jusque là défaut la tentative psychanalytique de Guerin ne fonctionne malheureusement pas et sombre régulièrement dans le ridicule peu aidé par des personnages vides de sens. Difficile de ne pas sourire
lorsque le cinéaste par l'intermédiaire d'une voix-off censée résonner dans la tête de Sandra lorsqu'elle perd pied compare les colombes à toutes les femmes qui ont traversé la vie de Fernando, des spectres aux ailes blanches qui attaquent l'adolescente sous l'oeil de son double version fillette et de sa poupée, ces oiseaux qu'elle hait, qui la terrorisent. En les tuant elle tue ainsi le passé de cet homme qui ne lui appartiendra jamais et se tue par la même occasion. Trop facile également d'assimiler les battements de leurs ailes aux spasmes orgasmiques de l'adolescente lorsque son amant la dépucelle.
La distribution 3 étoiles, dernier atout de cette bande, ne laissera quant à elle aucun amateur
indifférent. La grande Lucia Bosé interprète Alexandra avec le professionnalisme qu'on lui connait même si son talent n'arrive pas à donner une quelconque épaisseur à cette veuve. Glen Lee, séduisant bellâtre, véritable play-boy à l'oeil de velours venu du biker-movies, incarne Fernando dont Guerin semble amoureux tant il filme son acteur avec passion, le mettant le plus souvent possible en valeur. Difficile de ne pas se pâmer devant Glen, acteur américain exilé en Espagne où il fit la majorité de sa courte carrière, qui en ferait presque oublier une toute jeune Ornella Muti encore mineure. Troisième film d'Ornella après Seule dans la mafia et surtout le scandaleux L'amour dans la peau et le giallo Meurtre par intérim
Ornella, tout juste 16 ans, entamait sa période espagnole. Malheureusement Guerin n'a pas du tout su profiter de sa beauté juvénile vénéneuse. Il l'affadit au détriment de Glen Lee au grand dam de ses admirateurs. Ornella, candide sous son corps de presque femme que le cinéaste ne dénude quasiment jamais (une véritable honte), est bien trop transparente ici, perdant tout le venin de son rôle. On est loin des futures teensploitations morbides, ces drames torturés qu'elle tournera par la suite en reprenant régulièrement ce type de personnage. On soulignera l'apparition bien trop brève d'une Caterina Boratto lumineuse, la
quatrième et cruelle narratrice dédiée au cercle du sang de Salo ou les 120 journées de sodome.
Inoffensif quant à son scénario fade et trop peu fouillé, pas assez sulfureux pour réellement déranger, La casa de las palomas vaut essentiellement pour ses grandes qualités esthétiques et son alléchante affiche. Le premier film de Claudio Guerin reste un petit drame passionnel divertissant, une gentille curiosité inédite en France qui ravira les amoureux d'Ornella heureux de se délecter une fois encore de sa beauté nubile. Il reste cependant un des films les plus faibles de la jeune actrice parmi ceux qu'elle tourna durant cette période... et qui parmi nous tous n'aura pas adoré être déniaisé part le si charmant Glen Lee?