Sono stato un agente CIA
Autres titres: La loi de la CIA / L'ultimo missione / Spy kill / Covert action
Real: Romolo Guerrieri
Année: 1978
Origine: Italie
Genre: Polar / Noir
Durée: 88mn
Acteurs: David Janssen, Corinne Cléry, Maurizio Merli, Arthur Kennedy, Philippe Leroy, Ivan Rassimov, Giacomo Rossi-Stuart, Carla Romanelli, Tom Felleghy, Faidon Georgitsis, Lakimidos Dimitrios, Alberto Minelli, Giorgio Scardovi...
Résumé: Ex-agent de la CIA, Lester Horton s'installe à Athènes pour écrire son nouveau livre. Il a appris par ses anciens amis que certains membres de la CIA locale étaient compromis avec la mafia. Une bande magnétique compromettante pour les services secrets américains a également disparu. Son auteur quant à lui a été assassiné. A peine a t-il entamé son enquête que Lester est amené de force à Maxwell, le chef de la CIA d'Athènes. Il lui donne l'ordre de laisser tomber son enquête qui ne le regarde pas. Mais Horton ne l'entend pas de cette oreille et décide de continuer ses investigations à ses risques et périls puisque très vite un tueur va être à ses trousses...
Solide artisan de la série B transalpine, Romolo Guerrieri s'est tout au long de sa carrière somme toute assez courte dédiée au western (l'excellent Temps des vautours), au giallo (L'adorable corps de Deborah et La controfigura) et au polar (l'implacable Jeunes violents désespérés, Au service du citoyen) avant de finir son parcours comme bon nombre de ses confrères dans le post-nuke bon marché (L'ultimo guerriero) et la comédie sexy en fin de vie (La gorilla). Sono stato un agente CIA connu en France sous le titre La loi de la CIA qu'il réalisa en 1978 fait partie de ces petits polars oubliés noyés dans une production alors prolifique, le plus souvent passés inaperçus.
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Il est assez difficile de classer cette petite pellicule tant Guerrieri semble hésiter quant à la direction prendre. On est ici face à un mélange entre le film noir, le film d'espionnage, le polar et le mélodrame. Le film peut donc dérouter au premier abord mais même s'il part tout azimut avec une prédilection pour le mélodrame, l'histoire d'amour entre l'ex-agent et l'héroïne qui occupe la seconde moitié du film, il n'en demeure pas moins intéressant même si ceux qui attendent quelques bons moments de suspens et autres velléités entre agents, agents doubles et espions risquent d'être fort déçus. Calme et sérénité semblent être les maitres mots de cette bande qui se place sous le signe du romantisme et de l'idéalisme pour dénoncer la corruption des services secrets de la CIA, transformée en machine à tuer.
On a d'un coté un de leurs ex-agents américains, Lester Horton, qui aujourd'hui à la retraite décide d'écrire des romans. Un de ses amis est assassiné en Grèce après avoir enregistré une bande magnétique compromettante sur les liens qu'entretiendrait la CIA avec la mafia locale. Débarqué à Athènes Lester mène donc son enquête pour retrouver l'assassin et la fameuse bande. D'un autre coté on a la CIA et son chef qui voient d'un mauvais oeil les investigations de Horton et vont tout mettre en oeuvre pour l'empêcher de dévoiler leurs secrets. Au milieu se trouve Anne, une vieille amie, dont Horton va doucement retomber amoureux. Les éléments de base sont jetés, Guerrieri peut commencer à broder tout autour de cette trame peu originale mais cependant efficace.
Un des principal atout de La loi de la CIA est le lieu même de l'action, la Grèce. Entre Rhodes et Athènes, Guerrieri entraine son spectateur au coeur du pays des Dieux, sillonne de splendides sites côtiers, visite la capitale, fait le tour des iles environnantes, transformant son film en une véritable carte postale touristique qui ne peut que séduire l'oeil, le tout ponctué de quelques scènes d'action plutôt agréables et de quelques meurtres réussis rythmés par une superbe partition musicale signée par un Stelvio Cipriani visiblement inspiré, un des autres gros points forts du film.
Malheureusement l'ensemble manque sincèrement de nerf, de vitalité. Le film ronronne un peu trop comme si toute l'équipe du film somnolait sous le soleil grec. Privé de ce punch, trop gentillet, La loi de la CIA perd pas mal de sa crédibilité, peu aidé par une romance qui va accaparer une partie du métrage, Guerrieri ayant préféré s'intéresser plus au coté romantique de l'intrigue qu'à l'aspect polar. Ce déséquilibre nuit au film qui n'est néanmoins pas totalement inintéressant, loin de là ne serait ce que pour son personnage principal, Lester, un agent à la retraite, mélancolique, désillusionné, fatigué, qui n'a pas les armes ni la force physique de se battre contre ses anciens collègues à travers lesquels il découvre toute la férocité insoupçonnée des services auxquels il a appartenu et servi, préférant vivre son idylle au calme. Lester pourrait se rapprocher du personnage incarné par Franco Nero, le détective privé désabusé et alcoolique de Le jour du cobra. Malheureusement Guerrieri n'a pas vraiment su appuyer le coté émotionnel. L'intention est là mais la réalisation ne suit pas.
Surnagent également ça et là quelques bonnes séquences notamment celle de l'asile psychiatrique dans lequel Lester va subir de terribles électro-chocs et le plaisir de revoir toute une brochette de "gueules" du cinéma tant américain qu'italien malheureusement pas toujours au plus haut de leur forme, David Janssen en tête dans la peau de cet ex-agent mélancolique violent trop mollasson pour insuffler au film un brin d'énergie mais cependant crédible et somme toute sympathique. Ce sera son ultime apparition au grand écran puisque l'acteur, alcoolique, mourra deux ans plus tard d'une cirrhose, une bonne raison de visionner le film. Maurizio Merli fait une petite apparition à mille lieues de ses rôles habituels, peu crédible dans la peau d'un jeune espion américain idéaliste. Arthur Kennedy en chef mafieux grec fait simplement ce qu'on lui demande de faire, syndical et professionnel. Corinne Cléry, encore belle et fraiche, joue les faire-valoir et donne au film son zeste d'érotisme d'une exemplaire sagesse avant de mourir comme dans toute véritable love-story. Philippe Leroy incarne le commissaire poète à ses heures et plein d'humour, une note positive pour le film. Quant à Ivan Rassimov il endosse une fois de plus l'imperméable du méchant très méchant, un tueur implacable qui n'a aucune ligne de dialogue durant toute la pellicule mais dont on appréciera la mort filmée au ralenti, tué par un Janssen vindicatif et très en colère.
Nuage de douceur dans une production souvent brutale, il n'est pas sûr que La loi de la CIA plaise aux férus de polars musclés qui le trouveront très ennuyeux. Pour les moins exigeants, il reste une petite bande discrète, sympathique et divertissante à découvrir avec un certain plaisir. Film bâtard ultra convenu, il marque d'une part le début de la fin pour son auteur qui par la suite signera les très dispensables La gorilla et L'ultimo guerriero, d'autre part l'agonie d'un genre encore très prisé en Italie quelques toutes petites années en arrière.