Inga Alexandrova: le petit chausson russe
Parmi les starlettes étrangères qui firent carrière en Italie, certaines venaient de Scandinavie (Sirpa Lane, Anita Strindberg), d'Allemagne (Karin Schubert, Rosemarie Lindt), d'Autriche (Annie Carol Edel), de Suisse (Monica Zanchi)... C'est de Russie qu'arrivait cette brune aux pommettes saillantes, une ex-ballerine professionnelle qui décida de quitter ses froides contrées pour le soleil de Cinecittà. Si on se souvient d'elle aujourd'hui ce n'est pas pour sa courte filmographie qui s'étend sur quatre petites années, de 1976 à 1980, mais pour une scène en particulier qui restera à jamais gravée dans la mémoire du bissophile, la danse de Mlle Hitler revue et corrigée par Fabio De Agostini pour Le lunghe notti della gestapo. Traversons sans plus tarder l'Oural pour tenter d'en savoir un peu plus sur l'énigmatique Inga Alexandrova.
Née à Moscou en 1949, Inga Alexandrova a toujours rêvé de faire de la danse. C'est pour cette raison qu'elle entre très tôt à l'académie chorégraphique de Moscou afin d'intégrer le célèbre ballet Bolchoï. Danseuse émérite, elle fera partie quelques années de la fameuse troupe avant de créer le scandale dans une Russie encore très fermée en posant pour des photos dénudées. Car Inga a d'autres ambitions que de porter à vie le tutu. Désinhibée, impudique, le mannequinat l'attire. Elle quitte sa Russie natale au début des années 70 et part s'installer à Rome pour y tenter sa chance. L'Italie lui ouvre grand les bras. Une nouvelle ère commence pour la belle moscovite.
En 1976 elle fait ses grands débuts au cinéma aux cotés d'Enzo Cerusico, Nieves Navarro et Martine Brochard dans une petite comédie musicale policière aujourd'hui bien oubliée signée Luigi Petrini, A.A.A cercasi spia... disposta spia per conto spie / C'è una spia nel mio letto mais c'est surtout son film suivant qui l'a fait découvrir au grand public et pour lequel on se souvient encore d'elle aujourd'hui. Inga, version blonde, élégante, superbe, est en effet à l'affiche des Nuits rouges de la Gestapo de Fabio De Agostini, un nazisploitation plutôt arty dans lequel elle réinvente la fameuse danse de Mademoiselle Hitler lors d'une inoubliable séquence aujourd'hui culte. Nue, coiffée d'une casquette allemande, elle joue
avec une balle de ping-pong tout en exécutant une danse très suggestive avant de faire disparaitre la balle dans son vagin. Ce film sera suivi de deux autres, l'énigmatique Maldoror de Alberto Cavallone et le familial Zanna Bianca e il grande kid de Vito Bruschini, une des nombreuses adaptations du roman Croc-blanc dont elle est ici la protagoniste féminine principale.
L'année 1978 sera pour Inga une année bien chargée. Si elle prouve ses talents de comédienne dans la sexy comédie Malabestia de Leonida Leoncini dans laquelle elle joue le rôle d'une épouse frigide terrifiée par le sexe elle fait également la une de nombreuses revue spécialisées en posant nue. Elle apparait plus sexy que jamais dans les numéros de
Playmen et Playboy mais également la revue Guerin sportivo, des photos qui sèment la panique en Russie. Quelque soit l'opinion russe, Inga enchante l'Italie qui la surnomme gentiment "le petit chausson russe". Cette même année Inga retourne cependant dans son pays natal qu'elle n'avait plus revu depuis son départ. Elle passe par Moscou mais également Leningrad pour y présenter en fait le chansonnier bolognais Dino Sarti, célèbre artiste du cabaret italien, avant de regagner quelques mois plus tard Rome. Inga tourne son dernier film en 1980. Il s'agit de Masoch de Franco Brogi Taviani, une version trop peu sulfureuse de la vie de Masoch incarné par un audacieux Paolo Malco. Inga qui joue Irina y interprète d'ailleurs une très belle scène de danse ou comment marier la comédie à ses premières amours. Inga va par la suite diversifier ses activités. Elle continue jusqu'au milieu des années 80 de poser nue pour divers magazines dont Skorpio et fait surtout ses débuts à la télévision italienne en tant que présentatrice. Elle officie sur Telemilano, la pionnière des télévisions commerciales qui en 1980 devint Canale 5, une des plus importantes chaine italienne. Inga est notamment à la tête d'une émission pour enfant intitulée C'era una volta... . Elle est également la traductrice russe du journal télévisé International news où officiait aussi
sa consoeur autrichienne Annie Carol Edel qui de son coté traduisait en français. Inga restera au top quelques années encore puis se fera plus rare avant de disparaitre des feux de la rampe.
Ballerine de prodige, comédienne de talent, présentatrice, Inga était une artiste complète qu'on regrettera simplement de n'avoir pas pu voir plus souvent au grand écran.