Slavers
Autres titres: Razza schiava / Mafia cop
Real: Jürgen Goslar
Année: 1978
Origine: Allemagne
Genre: Drame
Durée: 88mn
Acteurs: Ray Milland, Britt Ekland, Ron Ely, Trevor Howard, Jürgen Goslar, Don Jack Rousseau, Helen Morgan, Cameron Mitchell, Ken Gampu, Larry Taylor, Brian O'Shaughnessy, Erica Schramm, Judy Goldman, Arthur Brauss...
Résumé: A l'aube de l'abolition de l'esclavage, deux puissants marchands d'esclaves se font la guerre dans une partie de l'Afrique de l'est. Chacun veut en effet se procurer le plus grand nombre d'esclaves et en tirer un maximum de profit. Entre révoltes esclavagistes et affrontements implacables, l'issue sera fatale...
En 1977 une série télévisée fit couler beaucoup d'encre. Véritable coup de poing au téléspectateur, Roots / Racines osait raconter sans détour l'histoire de l'esclavagisme et du colonialisme, montrer de manière implacable la traite du peuple noir, parler ouvertement de racisme à travers toute une série d'images choc qui en bouleversa ou indigna plus d'un. Le succès international de Roots donna l'occasion au cinéma de suivre le mouvement. Si en 1975 l'hollywoodien Mandingo avait déjà fait beaucoup parler de lui, ce fut de nouveau le cas
en 1978 avec Ashanti. Il aurait été plus que surprenant que le cinéma d'exploitation ne s'empare pas d'un thème si facilement propice aux pires excès. L'italien Mario Pinzauti nous avait offert en 1976 un exultant Emanuelle bianca e nera tourné simultanément avec le jouissif Mandinga, l'un avec Malisa Longo, l'autre avec Paola D'Egidio, deux films qui à leur façon suivaient la trace de Mandingo en attisant les instincts les plus vils du spectateur. En 1978 Mario Siciliano nous offrira quant à lui un joyeusement nauséabond Ecorchés vifs tandis que l'acteur-réalisateur allemand jürgen Goslar nous gratifia la même année d'un Slavers / Razza schiava qui se veut une illustration quasi historique des derniers jours de
l'esclavage avant son abolition en 1884.
Quelque part en Afrique de l'Est, aux alentours de l'an de grâce 1884 alors que l'esclavage connait ses derniers instants, deux marchands d'esclaves, le puissant Hassan et Sir McKenzie, se livrent une guerre sans pitié pour tenter de se procurer les meilleurs esclaves et en tirer le maximum de bénéfices. Parmi le peuple noir certains se dressent en traitres et sont à la solde de Hassan, chargés d'attaquer les tribus pour lui ramener des esclaves qu'il leur achète ensuite. La révolte gronde, les africains finissent par se rebeller et se retourner contre leurs maitres qui eux mêmes s'affrontent et finiront par s'entre-tuer dans un bain de
sang général.
Inutile de dire que l'aspect historique est très vite balayé. De l'esclavagisme et de la traite des noirs ne subsiste que le coté exploitatif poussé à l'extrême. Ce qui intéresse avant tout Goslar c'est de mettre mal à l'aise son public, de le choquer à tout prix tout en attisant son coté obscur. Pour cela, il a recours à toute une série de scènes plus odieuses les unes que les autres dont celle de la chasse humaine, sorte d'apothéose, de feu d'artifice, dans l'abomination et l'ignominie. Afin de distraire ses invités, des aristocrates guindés, Hassan choisit parmi ses esclaves, la plupart des adolescents, ceux qu'il va tirer comme de vulgaires
pigeons après les avoir poussé dans une mare. Chaque nouvelle mort est accueillie sous un tonnerre d'applaudissements. C'est très certainement une des scènes clé du film, celle qui illustre le plus exactement possible ce qu'était non seulement l'Homme noir aux yeux des Blancs, un simple animal, un être primitif dont il dispose à sa guise mais ce que fut réellement cette période, une barbarie. Slavers multiplie ce type de séquences brutales, violentes, durant quasiment 90 minutes comme le film s'attarde sur la nudité de ses esclaves. En fait Slavers n'est pas si loin des mondos africains de Jacopetti et Prosperi,
notamment Addio zio Tom. On y retrouve en effet le mauvais goût habituel de ce sous genre très controversé, une attirance pour le sulfureux, ce penchant malsain pour un certain voyeurisme, cette tendance discutable à projeter le spectateur au Paradis (l'Afrique et la beauté de ses paysages) pour mieux l'envoyer en enfer afin d'exalter ses pulsions les plus perverses. L'objectif est atteint. Slavers est un pur film d'exploitation qui sous couvert historique met en avant la face bestiale de l'Homme qui mesure l'infériorité de son prochain par la couleur de sa peau. Viols, humiliations, inspections corporelles, marquage au fer rouge, maltraitances, meurtres, cadavres couverts de mouches dévorés par les vautours,
révoltes dont celle des servants et esclaves du clan adverse qui envahissent la propriété du rival, voilà un menu qui devrait satisfaire un public avide de spectaculaire pestilentiel. Afin d'adoucir l'ensemble, Goslar y greffe une bluette entre une jeune esclave et son amant, prêt à tout pour la délivrer, en vain, et une romance entre la belle et douce Anna et le neveu de Sir McKenzie, un des rares personnages qui dévoilera progressivement une face humaine. Malheureusement dans cet univers implacable, entre haine raciale, puissance, avidité et rivalités, quelque soit la dose d'humanité qu'on montre il n'y a qu'une seule issue, la mort, comme en témoigne le massacre final d'où personne ne sortira vivant.
En tête d'affiche on retrouvera avec plaisir toute une pléiade de grands noms, tous excellents, dont les vétérans Ray Milland (Hassan) et Trevor Howard (Sir McKenzie) aux cotés de Ron Ely qui fut Tarzan pour le petit écran, Cameron Mitchell dont la mort, brulé vif recouvert de poussière d'or, reste un des grands moments du film et Britt Ekland. Jürgen Goslar s'est quant à lui octroyé le rôle de Max Von Erken.
Correctement mis en scène, bercé par des chants africains tout à fait plaisants, Slavers est une sordide petite série B d'aventures exotiques à l'ancienne qui a toutes les qualités pour plaire d'une part aux amateurs de mondo, d'autre part à tous les fervents amoureux de pure exploitation, ceux qui comme le Maniaco aiment faire rimer inhumanité avec festivité. Les puristes et amateurs de vérités historiques devraient détester mais y en a t-il seulement un seul ici?