Violenza contro la violenza
Autres titres: Vendredi sanguinaire / Vendredi sanglant / SOS police / Tueurs professionnels / Blutiger freitag / Bloody friday / Blodig fredag
Real: Rolf Olsen
Année: 1972
Origine: Allemagne / Italie /
Genre: Polar
Durée: 93mn
Acteurs: Gianni Macchia, Raimund Harmstorf, Amadeus August, Daniela Giordano, Christine Böhm, Ernst H. Hilbich, Gila von Weitershausen, Toto Mignone, Renate Roland, Walter Buschhoff, Horst Nauman...
Résumé: Un dangereux criminel, Heinz Klett, s'échappe de prison. Avec ses complices Luigi et Stevo, il projette d'attaquer un fourgon contenant des armes lourdes afin de braquer une banque. Rejoint par la fiancée de Luigi et son frère, la bande réussit l'attaque de la camionnette qui se termine dans un bain de sang. Ils prennent ensuite la banque en otage et demandent une forte rançon. Encerclés par la police, ils perdent leur sang-froid. Le carnage commence...
Vétéran du cinéma allemand, l'acteur-scénariste-metteur en scène Rolf Olsen est surtout connu du bissophile pour ses deux mondos Shocking Asia et Shocking Asia 2. Dans sa longue filmographie qui s'étend sur pratiquement trente ans, on retiendra plus particulièrement ce polar ultra violent qui prouve O combien le cinéma d'exploitation germanique n'avait absolument rien à envier aux excès du cinéma transalpin. Ceux qui pensaient encore que le polar allemand ou krimi se résumait aux placides enquêtes de Derrick risquent ici d'avoir bien des hauts le coeur.
Heinz Klett, un dangereux criminel, s'échappe avec l'aide de deux complices, Luigi et Stevo, d'un commissariat de police. Ils préparent l'attaque d'un fourgon contenant de l'artillerie lourde qui leur permettra de braquer une banque. Si l'assaut du fourgon vire au carnage les bandits, rejoints par Heidi, la petite amie de Luigi, et Christian, son déserteur de frère, parviennent cependant à s'emparer de toute l'artillerie. Ils n'ont plus qu'à attaquer la banque. Ils prennent en otages les clients et le personnel dont certains sont blessés. La terreur ne cesse de croitre au sein de l'établissement encerclé par la police qui les somme de se rendre. Les bandits réussissent tout de même à obtenir la rançon exigée et s'échappent en
voiture. Afin de protéger sa fuite Klett emmène deux femmes dont une jeune bourgeoise intrépide, fille d'un industriel, qu'il violera avant de la tuer. Gravement mordu par un chien policier, Luigi a besoin de soins urgents. Réfugiés dans un chalet les gangsters qui n'ont plus rien à perdre font venir un médecin à son chevet qui finira par donner l'alerte. La police cerne les lieux, les criminels n'ont plus aucune chance de s'en sortir vivants. Ils lutteront désespérément jusqu'au bout. C'est dans un bain de sang que l'assaut se terminera.
Tiré d'un fait divers réel, Vendredi sanguinaire n'en garde que l'aspect le plus violent, le plus
exploitatif, un choix qu'on ne reprocherait pas au cinéaste si cela n'avait pas nui à la crédibilité même de l'intrigue. La surenchère dans l'abominable, les excès gore et sanglants, la volonté de vouloir choquer à tout prix font le plus souvent rire plus qu'ils ne mettent mal à l'aise. Olsen force à outrance le trait, sombre dès les premières minutes dans la plus totale complaisance, une gratuité qui n'a d'égale que ce déchainement de violence inouïe. Coproduit par l'Italie, Vendredi sanguinaire peut très facilement se targuer d'être un des polars si ce n'est le polar le plus brutal et sanglant que la décennie ait connu, tout pays confondu. Particulièrement réalistes, les actes de brutalité se multiplient tout au long du film
dans un climat de folie générale. Olsen qui ne semble pas connaitre le mot pitié ne perd aucune occasion d'enchainer massacres, barbarie, fusillades, n'épargnant ni les handicapés ni les animaux ni même les enfants. Les balles perforent les mains, font exploser les corps, le sang gicle des veines sectionnées. On roue de coups des innocents ou de pauvres policiers, on leur écrase le visage contre le carrelage, on tue sans sommation, on viole. Mesquin, Olsen fait même jouer un enfant en bas âge avec une grenade oubliée sur un trottoir, la lui fait joyeusement dégoupiller avant qu'un valeureux représentant de l'ordre lui arrache des mains pour lui sauver la vie au péril de la sienne puisque la grenade explose.
Eventré, tentant vainement de retenir ses intestins qui s'échappent inexorablement de son corps, le courageux policier agonisera sur le béton. Jouissive certes, cette scène résume surtout à elle seule le film de Olsen. Une accumulation de séquences plus outrancières les unes que les autres qui désamorce assez rapidement l'horreur de cette tragédie qui se transforme donc en un spectacle grand-guignolesque, une partie de plaisir coupable où le grotesque prend le dessus sur la noirceur de l'histoire. Bien difficile en effet de ne pas éclater de rire devant ce bambin frais et souriant qui joue avec une grenade alors qu'un policier tente de l'attirer comme on attire un chien avec une balle avant qu'il ne se roule sur le bitume, ses
tripes dans les mains... ou comment peut être Joe D'Amato fut inspiré pour Anthropophagous!
Quant au sexe s'il est absent de l'histoire, Olsen profite tout de même du pantalon de cuir noir particulièrement moulant de Klett pour filmer en gros plan son entre-jambe gonflé alors qu'une des prisonnières le fixe avec désir, une idée qu'il réitérera juste avant que le voyou ne viole une des otages.
Maladroitement mis en scène, peu crédible, involontairement drôle, Vendredi sanguinaire est un pur film d'exploitation qu'on pourrait rapprocher des exactions d'un Mario Bianchi, plus
précisément sa série mafieuse dont font notamment partie les 5 de la brigade spéciale et Provincia violenta.
Le discours social est tout aussi radical et prêtera lui aussi à sourire tant il est sommaire. Le titre italien annonçait la couleur, la violence contre la violence, Olsen le respecte à la lettre et prend son public pour témoin avec ses fausses interviews de la masse populaire qui prône la peine de mort et une justice expéditive quant aux criminels, ces réactionnaires que caricature là encore à l'excès Heinz Klett, un individualiste sans pitié, un être sans foi ni loi qui voue à l'humanité une haine féroce qu'il illustre à travers des dialogues acérés fort amusants, aussi peu crédibles que le récit lui même. L'Homme n'est pour Klett
qu'un animal à abattre, la femme un tas de chair à violer, un point de vue qu'illustre avec poigne une des scènes marquantes du film. Alors qu'il fait l'amour à une des otages, des images de carcasses animales entassées dans un abattoir se mêlent à celles de corps nus tendrement enlacés, une manière assez sordide de montrer le point de vue des deux protagonistes, l'Homme d'une part, la Bête d'autre part. Il n'y a guère à débattre, il faut juste montrer et satisfaire les pulsions sadiques d'un spectateur avide de voyeurisme. C'est le but du jeu et celui visiblement de Olsen dont le film peut être comparé à ces journaux populaires à sensations fortes qui d'un fait divers aussi odieux soit il en tirent le coté le plus vil afin de captiver leur lectorat.
L'interprétation comme la mise en scène est à l'image du film, nerveuse, échevelée, démente, le robuste Raimund Harmstorf en tête. Incontournable figure du cinéma de genre transalpin, c'était pour le puissant teuton son premier véritable rôle au cinéma après s'être fait remarquer à la télévision l'année précédente dans la série Le loup des mers dans laquelle il incarnait le redoutable Wolf Larsen, une performance qui lui avait permis de se faire un nom et de bâtir une réputation qui jamais ne se démentit. Raimund, tout de cuir noir vêtu, offre ici une prestation hallucinée, véritable chien-loup, cruel et déterminé. Il trouve ici très certainement le rôle le plus violent de sa carrière aux cotés de Gianni Macchia,
l'érotico-divo du cinéma italien, sex-symbol de toute une époque, époque cheveux longs et rouflaquettes, dont le jeu plus modéré est cependant tout aussi névrotique. Parmi la distribution italienne on reconnaitra également Daniela Giordano, la jeune otage violée. Alors très connue en Allemagne, la blonde Christine Böhm, trop tôt disparue, apporte un peu de douceur à l'ensemble. Lui aussi fort populaire de l'autre coté du Rhin dans les années 70, Amadeus August qui joue son frère connut malheureusement lui aussi une fin précoce.
Tourné à Monaco, en Bavière, Vendredi sanguinaire connu en France sous de nombreux titres alternatifs n'est qu'un tragique fait divers volontairement et outrancièrement exagéré
pour alimenter les bas instincts d'un public pervers assoiffé de violence gratuite, du pur cinéma d'exploitation qui cache ses faiblesses derrière cette surenchère gore. Le procédé est sur la longueur un brin fatigant puisqu'il est quasi impossible de prendre cette cour de récréation pour adultes au sérieux ne serait ce que quelques minutes. Les puristes le haïront très sûrement mais il fera par contre la joie du bissophile par cette explosion nauséabonde de mauvais gout absolument jouissive.
Si on se méfiera des versions plus ou moins tronquées qui circulent ça et là, on optera non pas pour la version française qui appuie le ridicule des dialogues ni pour la version italienne dont le doublage n'est pas très convaincant mais pour la version allemande, la plus juste, du moins pour ceux qui maitrisent la langue de Goethe.