Pigs
Autres titres: Les monstres sanglants/ Horror farm / Daddy deadly's darling / The killer
Real: Marc Lawrence
Année: 1972
Origine: USA
Genre: Horreur
Durée: 81mn
Acteurs: Marc Lawrence, Toni Lawrence, Jesse Vint, Paul Hickey, Iris Korn, Jim Antonio, William Michael, Erik Holland, Don Skylar, Bone Adams, Bruce Adams, Catherine Ross...
Résumé: Violée par son père, Lynn l'abat. Internée dans un asile, elle s'échappe et trouve refuge chez Zambrini, un ancien artiste de cirque reconverti dans l'élevage de porcs et propriétaire d'un bar routier. Il l'embauche. Peu à peu leur folie se rejoint. Depuis son viol, Lynn voue une haine féroce à la gente masculine. Elle se met alors à tuer les hommes trop entreprenants. Elle donne ensuite les cadavres à Zambrini qui les donne en guise de nourriture à ses porcs...
Réalisé en 1972 par l'acteur-réalisateur Marc Lawrence qui débuta sa carrière dans les années 50, Pigs qui par son atmosphère poisse rappelle des oeuvres telles que Texas chainsaw massacre fait définitivement partie de ces "roughies" qui firent les beaux jours d'un certain cinéma d'exploitation indépendant américain des années 70.
Situé en pleine Amérique profonde, dans un décor rural oppressant, inquiétant, Pigs prend pour personnage principal une jeune fille, Lynn, qui autrefois fut victime d'inceste puis violée par son père qu'elle a assassiné de sang froid. Traumatisée, Lynn devenue démente et sexophobe voue depuis cet acte abominable une haine sourde envers la gente masculine. En rencontrant Zambrini, un vieil homme autrefois artiste de cirque qui a perdu la raison suite à de mystérieuses raisons, Lynn découvre le partenaire et complice idéal pour les meurtres qu'elle commet et vice versa puisque le vieil homme nourrit son élevage de porcs avec des cadavres humains.
Cette totale et véritable complémentarité est une des originalités de Pigs car jusqu'alors quasiment inédite. Rarement avait on fait cohabiter ensemble deux psychopathes de la sorte vivants en parfaite symbiose dans un milieu aussi glauque et étouffant. Le vieux Zambrini trouve en effet en Lynn la complice rêvée pour lui procurer les corps dont il a besoin pour nourrir ses cochons qu'il garde dans un enclos. Les animaux ont pris goût à la chair humaine depuis qu'une nuit ils ont par accident dévoré dans un champ un ivrogne endormi. Cette parfaite alliance se brisera cependant lentement lorsque Lynn fera un douloureux transfert de personnalité. Dans son esprit malade, l'image de son père se substitue dangereusement à celle de Zambrini qui par son comportement équivoque vis à vis de la jeune fille laisse planer une ombre quant à ses motivations profondes. Ce transfert ne pourra que conduire vers un inexorable drame tandis que les soupçons du shérif local quant aux mystérieuses disparitions qui affectait la bourgade se portent de plus en plus sur le tenancier du bar et cette fille.
Beaucoup plus atmosphérique que réellement horrifique Pigs qui met en avant quelques unes des pires déviances mentales et sexuelles humaines (inceste, parricide, bestialité, nécrophilie) dans un univers réunissant son lot d'autochtones aussi attardés que tarés joue beaucoup sur l'ambiance notamment lors des séquences nocturnes où les fameux porcs entrent en scène. Plus fantomatiques que vraiment présents, on devine essentiellement leur présence à travers leurs horribles grognements qui résonnent dans la nuit, dans leur enclos ou aux abords des maisons. On retrouve ce même climat oppressant dans la longue séquence où Lynn court dans le désert poursuivie par une horde de gorets invisibles dont les terrifiants grognements se mêlent à une musique aussi angoissante qu'assourdissante. La partition musicale joue d'ailleurs un rôle prépondérant ici. Entièrement composée d'une entêtante comptine qui appuie la folie des protagonistes, de quelques mélodies funky totalement décalées mais surtout des grognements immondes des porcs, la bande-son devient vite insupportable, suffocante. Elle aide ainsi beaucoup au malaise ressenti durant toute la vision du film.
Les scènes d'hallucination et de délires souvent très sombres filmées à l'aide de lentilles déformantes ponctuent de façon régulière le métrage, témoignage de la psychose de Lynn, au détriment même de l'horreur. Peu graphique, peu sanglant au final, Pigs ne compte que quelques courts plans gore, quelques démembrements et coups de couteau de boucherie notamment. Aux effets sanguinolents Lawrence préfère donc s'attacher à la mise en place d'une atmosphère de plus en plus maladive et faire de Pigs un long cauchemar crasse.
Quant aux fameux porcs du titre, ils ne sont que très peu présents mais chacune de leur apparition est suffisamment impressionnante pour provoquer chez le spectateur de doux frissons de répulsion. Lawrence ne montre la plupart du temps qu'un amas de groins ensanglantés et de dents qui dévorent goulument les corps que jette Zambrini aux animaux rendus fous par l'odeur du sang et de la chair humaine. De manière plus symbolique, les porcs représentent pour Lynn l'homme en règle générale qu'elle assimile depuis son viol à un vulgaire animal aux bas instincts régi par ses pulsions bestiales. Il n'est donc pas étonnant qu'elle les rejoindra lors d'un final macabre qui débouchera pourtant sur un retournement de situation tout à fait inattendu et particulièrement noir.
Film maudit, Pigs fut en son temps condamné aux circuits des drive-in. Incapable de sortir son film lui même, Lawrence le vit passer de distributeurs en distributeurs qui en changèrent le titre à leur guise ce qui explique la multitude d'appellations sous lequel il est aujourd'hui connu.
Le cinéaste s'est lui même octroyé le rôle de Zambrini tandis que sa propre fille, la pulpeuse Toni Lawrence, interprète Lynn. Tout deux plutôt convaincants, ils parviennent à donner un coté humain voire sympathique à leur monstrueux personnage, Zambrini gardant quant à lui une part de mystère quant à son passé et ses réelles motivations. De ce flou nait donc le doute, un atout non négligeable pour susciter un peu plus encore l'intérêt du spectateur avide de déviances en toutes sortes fasciné par cette petite production sordide, morbide à la photographie aussi sale que granuleuse. Les puristes se jetteront sur la vieille VHS sortie autrefois en France en version originale sous titrée français puisque l'édition DVD comme trop souvent a honteusement lavé et débarrassé l'image de son grain.
Pigs qui fut l'unique incursion de Lawrence au grand écran en tant que metteur en scène fait définitivement partie de ces petites productions méconnues totalement délirantes dans le sens le plus pathologique du terme. Pigs devrait par conséquent beaucoup plaire aux amateurs de déviances qui pour toile de fond ont cette Amérique profonde, symbole de toutes les tares du monde.