Tintorera
Autres titres: Tintorera du sang dans la mer / Tintorera les dents d'acier / Les dents d'acier / Le monstre aux dents d'acier / Tintorera the tiger shark / The silent death / Bloody waters
Real: René Cardona Jr
Année: 1977
Origine: Mexique
Genre: Horreur
Durée: 126mn
Acteurs: Hugo Stiglitz, Andres Garcia, Susan George, Fiona Lewis, Jennifer Ashley, Manuel Alvarado, Charles East, Pamela Garner, Erika Carlson, Alexander Chianguerotti...
Résumé: Esteban et Miguel, deux amis d'enfance, sont chasseurs de requins dans les mers du Sud. Entre deux parties de chasse, ils aiment séduire les jolies touristes. La belle américaine avec qui ils sont tous deux sortis l'autre nuit a disparu. La jeune femme a été happée par un redoutable requin tigre, Tintorera. Esteban et Miguel invitent tout un groupe d'estivantes sur leur yacht. Drague, danse, fête et alcool sont au programme. Mais Tintorera veille et s'apprête à attaquer. Miguel comprend alors le danger qui les guette et l'impitoyable combat qu'il va devoir livrer contre le squale...
Suite au succès mondial de Jaws de Steven Spielberg, nombreux vont être les réalisateurs qui vont alors surfer sur la vague des films de requins. Toute une vague de squales allait donc envahir nos écrans, tentant de reprendre avec plus ou moins de bonheur la trame de Jaws. Si l'Italie fut la première à s'emparer du phénomène avec notamment La mort au large de Castellari, le Mexique allait lui aussi nous offrir sa version grâce à l'infatigable René Cardona Jr, un des spécialistes au même titre que son père du cinéma Bis mexicain. Infatigable certes mais surtout très inégal puisque capable du meilleur comme du pire. C'est malheureusement dans cette dernière catégorie que se classe Tintorera du sang dans la mer connu également sous les titres Les dents d'acier et Le monstre aux dents d'acier.
Plus ou moins inspiré des écrits de Ramon Bravo, Tintorera, nom donné à un énorme requin tigre, s'éloigne cette fois du traditionnel schéma type du film animalier puisque le film de Cardona ressemble plus à un joli film de vacances délurées qu'à un film d'horreur à proprement parler. En fait Tintorera pourrait très bien se diviser en deux parties distinctes. La première nous offre une très longue vision de la vie exotique par le biais d'un groupe de personnages mené par deux amis pêcheurs, Esteban et Miguel, dont la philosophie se résume en deux mots: whisky et jolies filles. La plus grande partie du film soit plus de deux heures dans sa version intégrale, nous propulse au large des mers du Sud sur le yacht des deux pêcheurs où sont rassemblés de joyeux estivants et surtout estivantes qui lorsqu'ils ne dorment pas, s'enivrent, draguent et font l'amour. Autant dire que cela est particulièrement fastidieux puisqu'il ne se passe rien. Lorsqu'il quitte son petit bateau, Cardona balade sa caméra le long des plages ensoleillées et filme les paysages côtiers droit sortis d'un dépliant touristique lorsqu'il ne s'attarde pas sur les fessiers gourmands de ses actrices. En fait, Tintorera dont la lenteur de la mise en scène risque de faire sombrer le spectateur dans une douce léthargie est une jolie carte postale, baignée de soleil, toute frémissante au son des vagues sur lesquelles nos protagonistes la plupart du temps nus s'ébattent, insouciants, lorsqu'ils ne folâtrent pas cheveux aux vents en récitant d'assommants dialogues. Sea sex and sun tel semble avoir été le credo du réalisateur qui oublie un peu trop qu'au départ il était censé réaliser un film d'horreur.
Ceux qui attendaient donc de Tintorera un déluge de sang et d'effets gore seront très déçus. S'il est particulièrement avares en scènes d'horreur, le film nous offre par contre un grand nombre de séquences sous marines où on pourra admirer les squales entrain de nager. Bénéficiant d'une photographie soignée qu'on doit à Ramon Bravo lui même, fort bien réussies, celles ci sont toutes très belles et les amoureux des requins seront eux ravis.
Au crédit des rares attaques du fameux requin tigre, on retiendra essentiellement celle où il donne l'assaut à un groupe de vacanciers lors d'une fête. Saisissante de réalisme, sa violence risque d'en surprendre plus d'un. Pour le reste, Tintorera est surtout composé d'une kyrielle de séquences de chasse et de tueries animales fort réelles cette fois, le massacre des squales au harpon, qui rapproche le film du mondo. Souvent insoutenables, elles pourront facilement en faire grimacer plus d'un mais réjouiront tout ceux qui se délectent de ce type de scènes très controversées.
Cela n'est en rien une surprise, exotisme rime le plus souvent avec érotisme. Celui est bien entendu présent tout au long du film parfois de manière assez surprenante puisque certaines scènes franchissent par instant les limites du softcore tandis que Cardona prend un malin plaisir à filmer ses comédiens et comédiennes nus. Assez foudroyants sont les dialogues, très crus, et cette forte propension à la misogynie qui, associés à l'érotisme et aux massacres des requins nous rappellent que nous sommes bel et bien dans le pur cadre d'un cinéma d'exploitation qui se veut choquant et complaisant.
Rythmé par une abominable musique disco signée Basil Poledouris, Tintorera est un interminable travelogue touristique, une jolie et dépaysante croisière quelque part dans les mers du Sud qui donnera au spectateur la douce impression de vivre des vacances de rêve loin, très loin sous le soleil des îles sans bouger de son fauteuil. Sans être désagréable, Tintorera se laisse donc regarder mais en plus de ce coté dépaysant on aurait surtout aimé un peu plus d'angoisse et de suspens dans ce film supposé d'horreur.
En tête d'affiche on retrouvera une petite brochette d'acteurs tous plus médiocres les uns que les autres récitant de façon monocorde des dialogues insipides. Parmi eux, l'acteur fétiche de Cardona, le monolithique Hugo Stiglitz, qui se balade les fesses à l'air, nu sous son tablier, la dégaine de play boy latino du tout en muscles Andres Garcia, habitué aux productions de ce type et Susan George dont le seul véritable titre de gloire fut d'être l'épouse de Dustin Hoffman dans Les chiens de paille. Egarée sur cet océan de corps nus et dorés, Susan n'a jamais autant ressemblé à un poisson. On appelle cela le mimétisme.