Escalofrio
Autres titres: Escalofrio la nuit infernale / Satan's blood / Don't panic
Real: Carlos Puerto
Année: 1977
Origine: Espagne
Genre: Horreur
Durée: 82mn
Acteurs: Ángel Aranda, Sandra Alberti, Mariana Karr, Josè Maria Guillen, Luis Barboo, Ascensión Moreno, Manuel Pereiro, José Pagan, Isidro Luengo, Carlos Castellanos, Juan Piquer Simon...
Résumé: Après s'être fait accoster par un couple qui affirme les connaitre, un homme et sa femme enceinte acceptent leur invitation à passer un moment dans leur demeure, une maison isolée perdue en pleine campagne. Très vite, l'atmosphère devient étrange, pesante et la soirée se termine par une séance d'occultisme. Alors qu'ils souhaitent rentrer chez eux, un orage éclate les forçant à rester dormir. Durant la nuit, le couple participe à un sabbat organisé par leurs hôtes. Dés lors, les choses vont aller de mal en pis. Ils se retrouvent bloqués dans cette lugubre demeure, prisonniers de leurs hôtes, des satanistes cannibales apparemment immortels...
Méconnu et plutôt rare aujourd'hui, Escalofrio, la nuit infernale tourné en 1977 par Carlos Puerto secondé par Juan Piquer Simon qui fait également une très brève apparition s'ancre dans la longue lignée de films prenant pour thème le satanisme très en vogue dans les années 70 et plus précisément Rosemary's baby dont il se voudrait une sorte d'adaptation ibérique qui tirerait également vers Satan's slave et Nuda per Satana de Luigi Batzella.
Comme beaucoup d'autres films traitant de satanisme et de sectes diaboliques, Escalofrio mélange l'horreur et l'érotisme de façon exploitative en privilégiant ici les scènes à caractère sexuelles. C'est pour dire que l'érotisme est omniprésent tant et si bien que Escalofrio fut souvent considéré comme un film érotique à tendance horrifique.
Là où il diffère de ses semblables c'est par la totale incohérence du récit qui accumule les non sens jusqu'à devenir non seulement absurde mais également perdre toute crédibilité. Si l'ouverture laissait présager du meilleur, le viol suivi du sacrifice d'une jeune fille par un prêtre sataniste après qu'un démonologue, le Docteur Jimenez Del Oso, très célèbre alors en Espagne puisqu'il avait sa propre émission de télévision sur les grands mystères de notre monde, nous ait fait une thèse scolastique sur le Bien et le Mal, la suite laisse plutôt pantois. On fait la connaissance d'un couple, Andres et Ana, qui à un feu rouge, sont accostés par un autre couple, Bruno et Berta, qui les invite à passer l'après midi chez eux.
L'automobiliste serait un ancien camarade d'école de Andres même si celui ci ne le reconnait pas. Comment peut on imaginer que deux personnes sensées puissent accepter une telle proposition sans se méfier d'autant plus que la maison se dresse au milieu de nulle part. Si on accepte un tant soit peu ce préambule, il sera plus difficile de passer outre l'invraisemblance et l'illogisme du récit. Puerto développe une multitude de points qu'il abandonne presque aussitôt et très vite Escalofrio se transforme en un sorte de fourre-tout érotico-horrifique d'où vont naitre de très nombreuses questions qui jamais ne trouveront de réponse. Ainsi Ana est enceinte mais à aucun moment cela ne joue sur le développement de l'intrigue ni le fait qu'au cours d'une partie de Ouija, on apprenne qu'elle est amoureuse de son beau-frère et tuera elle même Bruno. Quant au couple d'hôtes, on reste le plus souvent pantois. Satanistes et adeptes de magie noire, ils sont entre autre cannibales et immortels.
Cependant Puerto a cru bon d'en faire des êtres au comportement incompréhensible (le mari est suicidaire, un comble pour un immortel) alors que la relation qui les lie n'est jamais très claire. Si on passe une fois encore sur ces désagréments, on aura du mal à ne pas être dépité par l'attitude totalement irrationnelle de Andres et Ana durant cette nuit infernale. Alors qu'ils pourraient facilement fuir devant les effroyables événements, tout semble être prétexte à ce qu'ils retardent leur fuite. Quand Andres ne préfère pas dormir, il veut se doucher ou petit-déjeuner et quand enfin ils décident de quitter les lieux, il ne s'aperçoit même pas que Bruno vient de débrancher sous ses yeux les fils de la batterie de sa voiture!!! On croit rêver!
Quant aux raisons pour lesquelles Ana et Andres ont été invités, elles ne seront jamais clairement expliquées. Afin d'étayer la partie horrifique, Puerto agrémente son scénario déjà fort confus d'éléments propre au cinéma d'épouvante: nuit d'orage, poupée de porcelaine possédée qui explosera dans une gerbe de sang, spiritisme, chien égorgé... mais aucun ne trouve réellement sa place ici puisqu'ils ne semblent exister que pour une seule et unique raison: créer un climat de terreur. Il en va de même pour les personnages secondaires. On ne saura jamais qui est le gardien de la maison qui erre la nuit dans le jardin ni le mystérieux homme qui déambule dans la maison et tentera de violer Ana encore moins qui sont les voisins de Andres et Ana. Tant de lacunes et de ridicule finit par tuer tout le climax que Puerto essaie en vain de créer et amoindrit fortement l'horreur du récit et par conséquent son intérêt. Escalofrio tourne en rond et ne subsiste pour garder l'attention du spectateur que les scènes choc, le soupçon de plans gore, l'étonnant final et surtout l'érotisme.
C'est là que réside tout l'intérêt du film, cet érotisme typique d'un certain cinéma d'exploitation transalpin, audacieux sans jamais être hardcore. On retiendra surtout la longue séquence de rites sataniques durant lesquels les deux couples font l'amour au milieu des pentacles et des bougies, les plans de nudité tant masculine que féminine et une pointe de saphisme bon enfant.
Toujours au crédit du film sa photographie soignée et son esthétisme, son décor lugubre digne des grands films d'épouvante et son climat souvent glauque et malsain d'où suinte par instant une terreur diffuse qui parvient à fonctionner tandis qu'au fil du métrage le piège se referme inéluctablement sur les deux héros, prisonniers des lieux. La découverte des organes humains qui remplissent le congélateur, les scènes de bestialité où Bruno et Berta mangent à pleine bouche comme des animaux ce qu'on devine être de la viande crue où plutôt des viscères humains et la mort terrifiante de Andres et Ana qui n'est pas sans rappeler Il profumo della signora in nero de Francesco Barilli sont autant de moments réussis propre à susciter un réel sentiment de malaise.
Escalofrio tire souvent vers le délire hallucinatoire, ce qui peut être une qualité ici, et au final on est en droit de se demander si tout cela n'est pas un simple cauchemar. Ceci pourrait alors expliquer ce scénario en dentelles dans lequel on compte les trous comme on compte ceux dans une tranche de gruyère... et nos hôtes sont justement friands de fromage!
Escalofrio qui au fil du temps s'est hissé au rang de film culte, un incontournable classique du film d'épouvante érotique satanique, sans jamais être véritablement nul rate le coche à force de trop vouloir jouer la carte de l'ambiguïté. Reste un film aux multiples références religieuses esthétiquement ravissant qui par instant fonctionne, distille de gentils frissons mais il demeure surtout une jolie curiosité pour tous les amateurs d'érotisme païen et de sexploitation à l'italienne. En ce sens, Escalofrio tient ses promesses et saura satisfaire son public.
La plupart des acteurs venaient de la télévision espagnole où ils ont poursuivi leur carrière par la suite. L'argentine Marianna Karr était une star des telenovelas tout comme José Maria Guillen. Les bissophiles auront reconnu Angel Aranda qui partagea sa longue carrière entre l'Espagne et Italie dès le début des années 60 puisqu'on a pu le voir notamment dans Le colosse de Rhodes, La planète des vampires, Red Killer et quelques spaghetti westerns.