La monaca del peccato
Autres titres: Le couvent des pécheresses / On l'appelle Soeur désir / Convent of sinners
Real: Joe D'Amato
Année: 1986
Origine: Italie
Genre: Nunsploitation
Durée: 88mn
Acteurs: Eva Grimaldi, Karin Well, Jessica Moore, Gabriele tinti, Gabriele Gori, Aldina Martino, Martin Philips, Beba Baltenao, Katalin Murany, Maria Pia Pasini...
Résumé: Après avoir été violée par son père adoptif, l'innocente Susan est envoyée dans un couvent. Elle devient vite la favorite de la Mère supérieure qui délaisse alors celle qui devrait lui succéder Soeur Theresa. Susanna repousse néanmoins les avances de l'abbesse par souci de conserver son innocence. Ivre de jalousie, Soeur Theresa va profiter que la Mère supérieure soit mourante pour maltraiter et torturer Susan afin de l'éliminer. Elle ira jusqu'à faire croire qu'elle est possédée par le Démon. Le haut clergé s'empare alors de l'affaire. Après qu'elle ait été exorcisée. Susan comparait alors devant un tribunal...
Ultime sursaut d'un genre qui jadis fit les beaux jours du cinéma Bis transalpin, le nunsploitation, La monaca del peccato tente de renouer avec les grands classiques dont il n'a malheureusement pas l'envergure malgré le talent de son réalisateur, Joe D'Amato dissimulé ici sous le pseudonyme de Dario Donati en hommage à son épouse et fidèle collaboratrice, Donatella Donati,.
La monaca del peccato n'est jamais qu'une nouvelle adaptation de l'oeuvre de Diderot, La religieuse, dont Jacques Rivette nous avait offert en 1966 une inoubliable version toute auréolée du scandale qu'elle provoqua à sa sortie. Violée par son son père adoptif, la jeune et innocente Susan est envoyée au couvent où elle va devoir subir la jalousie et la cruauté de soeur Theresa qui complote afin de succéder à la Mère supérieure gravement malade. Droguée, maltraitée, accusée de sorcellerie, elle sera l'énième victime d'une Eglise corrompue au service des plus riches.
La monaca del peccato connu chez nous sous différents titres français dont un ridicule, On l'appelle soeur Désir, et un beaucoup plus représentatif, Le couvent des pécheresses, tente une fois de plus de dénoncer les agissements coupables d'une Eglise perverse et hypocrite où au nom de Dieu on torturait d'innocentes novices avec la bénédiction d'une bourgeoisie complice. Ces lieux sacrés deviennent donc des prisons qui abritent en leurs murs des abbesses et des nonnes sadiques, lesbiennes et maniaques rongées par la jalousie et l'ambition. Pour parvenir à leurs fins elles n'hésitent pas à torturer et détruire les jeunes soeurs, couvertes par l'Inquisition et le Haut clergé grassement payés par la noblesse complice.
Malheureusement D'Amato n'est pas Rivette. Balayé ici tout contexte historique, toute forme de réflexion, le scénario préfère s'attarder longuement sur un érotisme plutôt léger en comparaison à Les amours interdites d'une religieuse, la première incursion de D'Amato dans le nunsploitation, en multipliant les scènes de nudité et d'ébats saphiques entre des nonnes frivoles et frustrées plus attirées par l'entre-jambe gourmand de l'homme à tout faire joué par un Gabriele Gori à cette époque filiforme et du jeune prêtre confesseur, Martin Philips, objet fantasmatique de Lilli Carati dans Lussuria, que par leurs devoirs sacrés. Les scènes de bain, d'onanisme, d'accouplements lesbiens entre soeurs euphoriques s'enchainent donc agréablement nous rappelant que nous sommes et restons dans le cadre d'un cinéma d'exploitation qui use de tous les clichés du genre pour le grand plaisir de l'amateur.
A cet érotisme débridé s'ajoutent quelques trop rares moments de déviance qui renvoient à l'âge d'or de ce cinéma avec notamment la séquence où la malheureuse Susan est pénétrée par un immense clystère rempli d'eau bénite afin de chasser le Démon qui est en elle et celle où Soeur Theresa lui flagelle violemment les parties intimes. L'ouverture du film reste quant à elle aussi un joli moment de voyeurisme, le fameux viol de Susan durant lequel D'Amato se complait à filmer son sexe alors que son père adoptif la brutalise. Quant au coté blasphématoire, présent par petites touches disséminées ça et là, on retiendra surtout la scène plutôt ratée où une nonne s'imagine faire l'amour avec le Christ qui doucement prend forme humaine sous l'apparence du prêtre confesseur. Bien peu envoûtante, dénuée de tout onirisme, on est à mille lieues de celle que nous offrait Mattei dans Novices libertines, proprement fantasmatique.
Au crédit du film également la beauté des décors très bien mis en valeur par une superbe photographie, la fluidité d'une réalisation qui ose par instant quelques astucieux plans qui utilisent à merveille ce cadre monacal. On saluera également la prestation de l'ex-sexy starlette Karin Well dans la peau de soeur Theresa, sadique à souhait, qui tranche avec le style de personnages qu'elle avait l'habitude d'interpréter. Elle parvient à donner au film cette once de cruauté qui justement lui fait trop défaut.
En fait, le véritable problème de La monaca del peccato se situe surtout dans son atmosphère générale. Il manque ce climat de tourmente, d'oppression, cette froideur et cette austérité qu'on retrouvait dans des oeuvres plus recherchées telles que Les religieuses du Saint Archange, La nonne de Monza et même l'intéressant Novices libertines de Mattei. Malgré le sadisme et la perversion des abbesses, le coté trop ludique du film brise la crédibilité de l'histoire. On a ainsi beaucoup de mal à s'attacher et croire aux malheurs de Susan et son lent martyr d'autant plus que son interprète, Eva Grimaldi, est loin d'avoir le talent requis pour le rôle. Première véritable apparition de Eva au grand écran avant une carrière en dents de scie qui se terminera à la télévision, son visage trop vulgaire et son maquillage bien peu approprié au personnage brisent encore plus sa crédibilité. On est loin très loin de l'innocence angélique de Eleonora Giorgi ou même la douceur et la force de Zora Kerowa.
Ajouté à cela des dialogues souvent stupides, un exorcisme bien peu convaincant et une fin certes attendue mais assez frustrante et cette deuxième tentative de nunsploitation de la part de D'Amato laisse au spectateur un petit arrière-goût de déception.
Malgré ses défauts, Le couvent des pécheresses reste un spectacle tout à fait correct qui remplit son objectif principal. Le film se laisse regarder sans déplaisir et devrait satisfaire les amateurs du genre de par son érotisme et sa petite touche de déviance fort bienvenue. C'est d'autant plus louable que le film vit le jour à une époque où le cinéma d'exploitation italien était en pleine agonie. Voilà donc un effort qui mérite d'autant plus récompense.