La disubbidienza
Autres titres: La désobeissance
Real: Aldo Lado
Année: 1981
Origine: Italie
Genre: Drame
Durée: 98mn
Acteurs: Jacques Perrin, Mario Adorf, Marie-José Nat, Theresa Ann Savoy, Stefania Sandrelli, Karl Zinny, Nanny Loy, Clra Colosimo, Marc Porel, Peter Boom, Annamaria Chio, Fiorella Buffa, Paola Puccini, Joseph Martorano...
Résumé: 1945. Luca, un militant antifasciste, a 15 ans. Il vit à Salo, république dirigée par un gouvernement fasciste. L'adolescent décide de changer les choses et s'enrôle chez les partisans. A la fin de la guerre, Luca est de plus en plus désillusionné car il voit tous ses espoirs s'envoler. Rien n'a changé en Italie. Il préfère mourir que de vivre dans ce pays dont il ne veut pas. Il est sauvé par la jeune et nubile Edith, la maîtresse de son père, qui va faire alors faire son éducation sexuelle. Le jeune homme est très attiré également par la soeur d'Edith,vAngela, son infirmière, une jeune femme charnelle et passionnée. Quand Edith meurt d'une crise cardiaque, Angela fera de Luca un homme. Mais les événements politiques vont bouleverser la vie de Luca. Le referendum de 1946 est proche. Luca après une ultime trahison sentimentale quittera sa famille après l'avoir menacé d'un révolver avant de disparaitre dans la tourmente...
L'idée de La disubbidienza est née suite à une série de téléfilms que Aldo Lado avait tourné pour la France à l'époque de la deuxième chaine de télévision. Cette série de téléfilms ayant remporté un joli succès, on lui demanda alors de réaliser un film mais le format n'était guère adapté à la chaine et l'idée fut abandonnée. Lado décida donc d'en faire un projet cinéma puisque l'idée lui tenait à coeur. La disubbidienza est en fait l'adaptation libre du roman de Alberto Moravia que Lado transpose dans l'univers fasciste de Salo. Oeuvre profondément sombre et pessimiste, La désobeissance traite de la rébellion et de la révolte de la jeunesse dans l'Italie d'après-guerre en pleine effervescence.
Le film est scindée en deux axes principaux. Le premier est l'itinéraire politique du jeune Luca, 15 ans, un fils de la haute bourgeoisie italienne. Jeune militant antifasciste, Luca est désespéré de voir son pays sombrer dans le capitalisme et ses anciens amis de lutte sympathiser avec les vainqueurs et tomber dans les pièges de l'américanisme.
Luca représente l'archétype même de l'adolescent désenchanté, perdu dans une Italie qu'il refuse. Il finit donc par se faire renvoyer de l'école et tombe malade.
Le deuxième axe du film est l'éducation sentimentale et sexuelle de Luca en proie aux premiers tourments de l'amour. Déstabilisé par ce pays qu'il renie, troublé par les turpitudes du sexe, Luca est un enfant à fleur de nerf, en pleine crise, emporté par le tourbillon de ses idées et des affres de ses premiers désirs d'homme.
Si Lado a parfois du mal à correctement relier ses deux axes, La désobeissance reste en tout point un film à la fois troublant et magnifique, désespéré et sensuel. On y retrouve le thème cher au cinéma italien d'alors, cette bourgeoisie hypocrite et décadente qui mène ses enfants à la révolte et l'anarchie. C'est une fois encore à travers l'érotisme qu'elle est mise en évidence. Si l'éducation érotico-sentimentale de l'adolescent est ici le symbole de son aspiration à une vie nouvelle, elle est surtout un des pivots centraux du film et la partie la plus soignée, la plus émouvante également.
Lado la traite comme un roman-photo d'où émane une sensualité exacerbée, une force assez incroyable à l'image des aspirations et exigences de l'adolescent déçu par tout dont la vie devient chaque jour plus dérisoire.
Malheureusement la vie le décevra une fois de plus. Attiré par Angela son infirmière, c'est dans les bras de sa jeune soeur Edith qu'il découvre les jeux interdits de l'amour avant qu'elle ne meurt et découvre par la même occasion qu'elle était la maitresse de son père, la remplaçante d'une épouse absente trop absorbée par sa carrière. Cet amour incestueux qui tout scandaleux pourrait il paraitre est ici mis en beauté, preuve de la force des sentiments qui lie les deux jeunes amants.
C'est avec Angela qu'il vivra un amour passionné avant qu'elle ne soit renvoyée par son père pour son attitude odieuse car elle a non seulement déjà un amant mais elle s'est jouée de son fils.
Cette ultime désillusion mènera Luca à la révolte finale. Il menacera d'un revolver ses parents en clamant: "Je désobeirais vingt ans encore", un geste ici hautement symbolique, avant de fuir vers le dernier espoir d'un renouveau: le referendum de 1946.
Lado pousse le pessimisme jusqu'à l'ultime image du film qui verra la foule engloutir Luca et Angela comme la vie a englouti leurs aspirations, séparés à jamais, symbolisant fin d'un rêve, terrible reflet d'une Italie qui sombre lentement dans le chaos politique et social.
Magnifié par la bouleversante partition musicale de Ennio Morricone, La désobeissance dont on admirera les très beaux décors vénitiens est une oeuvre érotico-politique empreinte d'émotion qui met en avant un érotisme d'une sensualité extrême sublimé par la photographie de Paolo Tassara. Osé tout en sachant rester pudique, on retiendra quelques scènes absolument superbes comme celle où, simplement séparés par un voile diaphane qui épousera lentement leurs formes la jeune Edith, presque irréelle, étreint l'adolescent avant qu'ils ne s'aiment tendrement. A leurs étreintes nubiles mais déjà passionnées s'opposent celles qui unissent l'adolescent et l'infirmière dont le corps de femme cette fois correspond à la maturité des sens et des relations charnelles cette fois passionnelles.
Aux cotés de Mario Adorf, Marie-José Nat, Jacques Perrin et l'apparition éclair d'un Marc Porel dont la mort avait déjà envahi le regard, il mourra l'année suivante, on retrouve la voluptueuse et charnelle Stefania Sandrelli que Lado voulait à tout prix dans le rôle d'Angela et la nubile Therese Ann-Savoy, lancée nouvelle scandaleuse lolita par Alberto Lattuada et Tinto Brass, toutes deux éduquant un tout jeune Karl Zinny qui a la justesse de son personnage.
La désobeissance même s'il n'égale pas certains chef d'oeuvres tel que Le mépris est en tous sens un très bon film baroque et désespéré qu'on prendra plaisir à découvrir même si son réalisateur avoue ne pas être satisfait du résultat final, en dessous de ce qu'il aurait aimé faire.