Via appia
Autres titres:
Real: Jochen Hick
Année: 1989
Origine: Allemagne
Genre: Drame
Durée: 90mn
Acteurs: Peter Senner, Guillherme De Padua, Yves Jensen, Margarita Schmidt, Gustavo Motta, José Mario Berenguer...
Résumé: Frank est un ex-stewart de la Lufthanza. Lors d'un séjour à Rio il a couché avec un jeune brésilien, Mario, qui avant de disparaitre lui a laissé un mot écrit sur le miroir de la salle de bain: Welcome to the Aids-club. De retour à Hambourg, Frank décide de repartir pour Rio avec un ami régisseur afin de retrouver Mario. Tout en filmant la vie des jeunes prostitués brésiliens et en prenant des tas de clichés de tous ces garçons, Frank et son ami errent dans les lieux de drague de Rio, les bars, les chambres d'hotels... Ils rencontrent José, un jeune prostitué qui leur offre son aide contre quelques clichés et billets. Ensemble ils vont tenter de retrouver Mario que José semblerait connaitre...
Spécialisé dans le documentaire gay, l'allemand Jochen Hick signait en 1989 son premier long titrage intitulé Via appia. Avant toute chose il est bon de remettre le film dans son contexte pour mieux comprendre l'impact qu'il put alors avoir lors de sa sortie. Hick a choisi pour ce premier film un thème alors encore tabou, le Sida. Si la maladie était encore pour beaucoup un mystère, un nom synonyme de mort qui faisait trembler, elle décimait surtout la communauté homosexuelle à une vitesse foudroyante. Faire un film sur ce sujet était donc une véritable gageure quelques années avant Les nuits fauves de Cyril collard.
Via appia prend pour héros Frank un jeune homosexuel, un ex-stewart de la Lufthansa, qui a contracté le virus aprés avoir couché avec un jeune brésilien Mario. Le garçon lui avait simplement laissé un mot sur le miroir de la salle de bain en lui souhaitant la bienvenue dans le monde du Sida. Quelques temps plus tard, accompagné par son ami régisseur, il décide de retourner à Rio afin de retrouver Mario. C'est le début d'une longue errance à travers la ville, ses lieux de plaisirs masculins, ses bars, ses lieux de drague et la Via appia, une rue où se retrouvent tous les jeunes prostitués de Rio.
A travers ce voyage Frank ne cherche en aucun cas à reprendre contact avec Mario. C'est une façon pour lui d'exorciser sa peur, d'adoucir son combat contre la maladie et de rendre en quelque sorte la mort plus tangible. Via appia est une sorte d'odyssée, sombre, lugubre, tournée comme un véritable film vérité le plus souvent en 16mm.
Avec son ami, Frank fait de son voyage un film sur la vie homosexuelle à Rio. Il guide le spectateur dans les bas fond de la ville, ses pépinières à sexe que sont les lieux de drague et surtout la Via appia où les jeunes prostitués et les plus anciens, les travestis vendent leur corps aux touristes, se masturbant dans les phares des voitures. Leur caméra filme, ils prennent des tas de clichés de tous ces jeunes hommes qu'ils développent ensuite dans leur chambre noire, témoignage à la fois sinistre et tendre de cette dangereuse vie faite de plaisirs sur l'instant.
Via appia se veut une sorte de documentaire sur cette vie, sur le tourisme sexuel, ces rencontres éphémères qui sont à l'origine le plus souvent de la contraction de la maladie. Hick nous fait découvrir la prostitution juvénile dans un Rio glauque où le danger semble être partout.
Contre toute attente, Frank et son ami vont se voir proposer l'aide d'un jeune prostitué, José, qui en échange de quelques billets et quelques photos de lui les aidera à retrouver Mario. Si le lien qui unit José et Frank semble un peu se reserrer au fil du temps, tout reste ici platonique, il n'y a aucune place dans Via appia pour les sentiments, le romantisme et encore moins l'amour.
Hick pourtant évite tout voyeurisme gratuit, toute complaisance, il sait rester pudique même dans les scènes de nudité fort nombreuses. Le film eut cependant quelques démêles avec la censure pour ses quelques séquences de sexe et sa pléthore de scènes de nudité frontale. Provocant, cinglant mais toujours profondément sincère, Via appia même si le sujet a perdu un peu de sa force vingt ans plus tard n'en est pas moins toujours d'actualité. Hick a réalisé un film fort, intime, jamais condescendant sur l'homosexualité et le Sida en des temps où ce dernier effrayait encore méchamment notre société occidentale. Via appia ne cherche aucunement à démontrer quoi ou qu'est ce, c'est tout simplement un voyage executoire d'un condamné au coeur d'un univers où trop souvent la mort est au bout du plaisir.
Si Peter Senner et Yves Jensen ont un jeu trés interiorisé, presque discret, et s'ils n'irradient pas l'écran, ce qui n'était pas le but de Hick, le jeune Guilherme De Padua, un ancien prostitué reconverti le temps du film et d'une série télévisée, leur vole la vedette et donne au film toute son énergie. Les amateurs de latin lovers seront soyons en certain sous le charme de ce garçon totalement déshinibé.
Aprés quelques autres films documentaires tout aussi passionnants, Hick choisira de nouveau le thème du Sida pour son inquiètant thriller No one sleeps.