Il miele del diavolo
Autres titres: Plaisirs pervers / Le miel du diable / The devil's honey
Real: Lucio Fulci
Année: 1987
Origine: Italie
Genre: Drame / Erotique
Durée:
Acteurs: Blanca Marsillach, Brett Halsey, Stefano Madia, Corinne Cléry, Paula Molina, Bernard Seret...
Résumé: La jeune et belle Cecilia vit une histoire d'amour passionnée avec Gaetano, son amant. Ensemble, ils explorent sans cesse d'autres zones de leur sexualité à travers jeux et perversions diverses. Suite à un accident, Johnny doit être opéré mais il meurt sur la table d'opération. Inconsolable, devenue folle par la mort de son amant, Jessica kidnappe alors le chirurgien, un quinquagénaire un peu perdu, qu'elle tient pour responsable du décès. Elle l'enchaîne nu, l'oblige à manger de la nourriture pour chien, en fait son parfait esclave. Inconsciemment elle poursuit ses jeux sado-masochistes avec le pauvre homme qui lentement va tomber amoureux de sa tortionnaire. Jessica réalise finalement qu'elle éprouve aussi quelque chose pour cet être que pourtant elle hait. Un quelconque amour serait il possible entre eux?
Méconnu et injustement oublié de la filmographie de Lucio Fulci, Il miele del diavolo sorti furtivement en salles sous le titre Plaisirs pervers mérite pourtant toute l'attention du spectateur. Loin des films d'horreur qui lui apportèrent gloire et notoriété, Fulci signe là un film sur l'amour obsessionnel, viscéral qui pourra rappeler sur certains aspects 37°2 le matin de Beineix.
A travers trois personnages, Cecilia, Gaetano et Guido, Fulci retrace le parcours d'une jeune femme amoureuse folle de son amant et folle est à prendre ici au sens pathologique du terme. Cecilia est éprise de Gaetano qui explore avec elle les différentes facettes d'une sexualité essentiellement basée sur des rapports maître-esclave. Guido, un chirurgien quinquagénaire en plein doute conjugal, ne peut quant à lui prendre du plaisir qu'avec des prostituées. Lorsque Gaetano meurt suite à une opération menée par Guido, Cecilia, inconsolable, sombre dans le désespoir accentuant ainsi sa pathos. Elle kidnappe le chirurgien et l'attache nu à une chaîne. Nourri avec de la pâtée pour chien, il devient son esclave jusqu'au jour où il décidera de sa mort. Un bien étonnant rapport va pourtant naître entre eux, une attirance de l'esclave pour son bourreau d'où va lentement jaillir une forme d'excitation perverse dans laquelle chacun y trouvera un plaisir morbide tandis que Cecilia revit par flashes-back son amour pour Gaetano. Passé et présent se confondent alors jusqu'au jour où la réalité va reprendre sa place.
Fulci tente de mettre en scène cette aussi inquiétante qu'effrayante loi psychologique qui veut qu'on aime aujourd'hui ceux qu'on haïssait hier et inversement. Il ne s'agit pas ici d'un jeu de domination mais d'un douloureux et bien involontaire voyage introspectif de deux êtres chacun à leur manière à la dérive qui en fin de compte se révélera non seulement décevant et désespéré mais si ironique.
Plutôt convaincant malgré la pauvreté évidente des moyens dont bénéficia Fulci, Le miel du diable explore avec une certaine intelligence le monde de la sexualité, celle d'une femme qui tente de reconstruire son histoire d'amour à travers celui qu'elle considère comme responsable de la mort de son amant afin de faire perdurer cette folle passion pour cet homme avec qui chaque jour elle découvrait de nouvelles expériences érotiques, bisexualité incluse.
Cecilia est à l'image de toute femme et par extension de tout être humain, en quête de renouveau constant afin d'étancher sa soif de sexe. Mais il ne peut vivre toute sa vie de jeux et d'amour illusoire. C'est dans la douleur que Cecilia en prendra conscience lorsque Gaetano la forcera à avorter aprés qu'ils aient involontairement conçu un enfant. La vie est ainsi faite, cruelle. Gaetano représente donc cette sagesse qui ramène les âmes à la dure réalité. Cependant, l'amour peut aussi naître de la cruauté. Guido se rendra compte des sentiments qu'il éprouve pour Cecilia lorsqu'elle lui embrasse le ventre barbouillé de sang tandis que la jeune fille réalisera qu'une relation pourrait être envisageable entre eux. Mais le saurons nous jamais? Fulci opte pour une fin ouverte qui laissera chacun imaginer ce qu'il veut bien imaginer. Aprés avoir fait l'amour dans le même lit, Cecilia sort un revolver du chevet alors que la caméra s'envole et se fige, laissant place au générique de fin.
En bien des points, le film de Fulci fait penser à La gabbia / L'enchaîné de Giuseppe Patroni-Griffi, qui à sa façon avait déjà traité le même sujet. Efficace, intelligemment construit, Le miel du diable mérite d'être redécouvert et réestimé à sa juste valeur et pas uniquement pour ses séquences érotiques souvent audacieuses et étonnantes de la part de Fulci qui réalise un film sur la sexualité avec de la sexualité, sans fard ni détour.
Fiévreux, maladif, désespéré et torride, Le miel du diable doit aussi beaucoup à l'interprétation de ses acteurs avec en tête Blanca Marsillach qui incarne une Cecilia aussi ardente que morbide. A ses cotés, le regretté Stefano Madia et un surprenant Brett Halsey dans le rôle du malheureux chirurgien. On notera la présence de Corinne Cléry, discrète, qui se glisse le temps de quelques scènes dans la peau de l'épouse de Guido.