Vizi privati pubbliche virtù
Autres titres: Vices privés et vertu publique / Private vices, Public pleasures / Privatni poroci, vrline javne
Real: Miklos Jancso
Année: 1976
Origine: Yougoslavie / Italie
Genre: Drame / Erotique
Durée: 104mn
Acteurs: Lajos Balazsovits, Theresa Ann Savoy, Laura Betti, Suzanna Javicoli, Pamela Villoresi, Franco Branciaroli, Ivica Pajer, Umberto Silva, Ilona Staller, Demeter Bijenc, Aniko Safar, Gloria Piedimonte...
Résumé: Les amis de l'héritier du trône qui complotent contre l'empereur provoquent un scandale et organisent une orgie.
Réalisé en 1976, Vices privés, vertu publique n'est autre qu'une adaptation de l'histoire des Mayerling vue par l'oeil acerbe du réalisateur hongrois Miklos Jancso. Présenté à Cannes en 1976 où il fit grand scandale, sa vision de l'histoire est une sorte de fable politique se focalisant sur un acte de rebellion. Tourné en pleine campagne italienne dans des décors buccoliques et de somptueuses demeures, on peut voir ce film comme un poème pervers, une ode au sexe et à la débauche dans ses formes les plus osées et obscènes accompagnée de chants révolutionnaires comme La carmagnole.
Jancso met en scène ni plus ni moins qu'une attaque contre l'autorité patriarcale. Le sexe, la débauche et surtout la perversité sont pour lui l'arme suprême contre cette tyrannie. S'adonner à la débauche la plus outrancière, s'exhiber nu est l'acte rebelle par excellence, la nudité et la vision de la moindre parcelle de chair étant interdite sous l'ancien régime.
Rapsodie sexuelle, drame pastoral, Vices privés... choqua en son temps par l'explosion de tous les interdits sexuels que transgresse Jancso qui ne se donne plus de limite. Il balaie tous les tabous, écrase toute forme de morale, fait fi de toutes bonnes moeurs en étalant les plaisirs de la chair comme instrument de guerre. Son film est un immense lupanar s'étalant sur 104 minutes, un gigantesque bordel campagnard se transformant en une sorte de mascarade festive et hystérique, un carnaval païen où l'on s'affuble du masque de l'empereur pour mieux se donner à l'outrage. Echangisme, triolisme, gigantesques orgies entre jeunes et adultes, libertins, maîtres et servantes jusqu'à l'hérésie ultime, l'hermaphrodisme sont donc au programme. La baronne est en effet une monstresse de foire qui sodomisera en public un garde de l'empereur affublé au préalable du masque du souverain.
La dernière partie du film sombre dans la plus totale hystérie, formant alors une sorte de point de non retour. L'outrance donne dans la surenchère et avoisine souvent la folie sexuelle. Le blasphème trouve son paroxysme dans les deux dernières séquences. D'une part celle où le dauphin nu se transforme en poule et sort de son cul un oeuf qu'il casse sur la baïonnette d'un des gardes impériaux symbolisant ici la mort du fils vis à vis du père. D'autre part dans l'homosexualité ici suggérée lorsqu'il s'adonne aux plaisirs virils avec son conseiller. L'acte sodomite est cette fois privé après l'enculade publique de l'hermaphrodite représentant la négation de toute vie sous l'oeil de la servante qui réalise soudain toute l'horreur de la situation. Mais il est trop tard, la baronne et le dauphin sont tués puis maquillés et habillés comme s'ils s'étaient eux mêmes donnés la mort en raison de leur impossible amour.
Beaucoup ne virent dans Vices privés... qu'un étalage de sexe et de chair indécente mais ce film est assez déconcertant et surtout difficile à situer dans l'univers de Jancso qui fut emprisonné à la sortie du film pour obscénités. C'est avant un film qui cherche à briser toutes formes de valeurs tant religieuses que morales, une transgression des tabous et le refus total de toute autorité hiérarchique et patriarcale en utilisant la chair, le sexe, comme instrument de répression et de délivrance qui ne peut mener qu'à sa propre perte. La morale pernicieuse sort toujours vainqueur dans ce type de combat.
Dans de superbes décors, le jeune Lajos Balasovits dévoile sans pudeur son corps noueux en endossant la peau du Dauphin, Laura Betti est une opulente et bien coquine servante, la regrettée Suzanna Javicoli dont la mort dans Suspiria restera un des grands moments du film d'horreur italien est une jeune noble fort débauchée. Ilona Staler y fait également une apparition. On remarquera surtout l'énigmatique Theresa Ann Savoy dans le rôle de la baronne hermaphrodite.