Giochi carnali
Autres titres: Exciting love girls
Réal: Andrea Bianchi
Année: 1980
Origine: Italie
Genre: Rape and revenge
Durée: 108mn
Acteurs: Sirpa Lane, Franco Parisi, Domenico Anastasi, Alessandra Vazzoler, Florence Aubry, Massimililiano Baratta, Vittorio Zarfati, Brunello Chiodetti, Pauline Teutscher, Paolo Gramignano...
Résumé: Deux collègues de travail désormais au chômage, Carlo et Michele, ont pas mal de temps libre pour se divertir. Une de leurs passions est de traquer des jeunes filles sur les routes pour les violer. Un jour, ils font monter à leur bord une jeune infirmière tombée en panne de voiture. Ils l'amènent chez eux, la séquestrent et la violent. La vengeance de la jeune fille sera terrible...
Essentiellement connu pour ses sexy comédies et ses films érotiques bas de gamme Andrea Bianchi, l'inoubliable metteur en scène de l'inénarrable Manoir de la terreur et du sexy giallo osé mais ridicule Nude per l'assassino, réalise Giochi carnali en 1980 alors que le cinéma érotique et le cinéma pornographique sont en pleine phase transitoire. Le film de Bianchi, tardivement sorti sur les écrans italiens en 1983, représente parfaitement bien cette transition, oscillant sans cesse entre érotisme osé et pure pornographie même si c'est bien entendu au Rape and revenge auquel on pense au vu du scénario particulièrement léger.
Deux collègues de travail se retrouvent au chômage. L'un est marié, son comparse quant à lui se travestit en femme. Ils ont désormais beaucoup de temps devant eux pour s'amuser et surtout satisfaire leur instinct libidineux. Ils écument donc les routes en quête de jeunes auto-stoppeuses ou de demoiselles en détresse non pas pour leur venir en aide mais pour les violer. Un jour, ils prennent à leur bord Daniara, une infirmière tombée en panne de voiture. Sous prétexte que les garages sont fermés, ils lui proposent de passer la nuit chez eux. Ils la droguent et la violent. Sa vengeance sera odieuse puisque après les avoir endormi, elle les castrera. A la lecture du scénario, on peut en effet ranger Giochi carnali
dans la catégorie du Rape and revenge. On y retrouve en effet les éléments inhérents au genre, les viols à la chaine dont l'ultime, celui de l'infirmière, qui conduira la victime à se venger de ses bourreaux d'une horrible manière. Malheureusement le film de Bianchi est si maladroit dans sa construction qu'il en devient bien vite inoffensif.
Le principal souci est qu'il oscille constamment entre le Rape and revenge, la sexy comédie à l'italienne traditionnelle, l'érotisme léger et la pure pornographie sans jamais trouver son juste équilibre tant et si bien qu'au bout d'un moment le spectateur ne sait plus vraiment ce qu'il est entrain de regarder ni à qui il a à faire. Les deux violeurs sont en effet présentés
comme deux pauvres lurons, deux bons bougres voyeurs, deux campagnards en manque de sexe: le bon moustachu rondouillard marié à une imposante matrone qui le rebute sexuellement et un éphèbe soumis à son austère mère qui aime se travestir en femme. ils aiment faire le pitre, ne feraient pas de mal à une mouche, ils veulent juste s'amuser avec de jolies jeunes femmes comme dans toute sexy comédie qui se respecte sauf que cette fois on passe à l'échelon supérieur, on viole. Discutable certes mais après à chacun ses loisirs, le cinéma d'exploitation n'est il pas fait pour donner vie à nos pulsions les plus viles?
Lentement on glisse donc vers la pornographie et les agressions sexuelles assez violentes et surtout malsaines dont une spectaculaire dans des toilettes désaffectées. Le terme lentement est ici inadéquat puisque le film s'ouvre directement sur un viol. Les deux hommes contraignent sous la menace d'un couteau une femme à les sucer avant d'abuser d'elle. A aucun moment Bianchi ne tente d'expliquer leurs agissements et ces agressions semblent donc totalement gratuites, uniquement présentes pour faire de Giochi carnali un simple hardcore qui alternerait scènes de violence (trois viols différents se succèdent), scènes cocasses (toute la grosse artillerie de la comédie érotique égrillarde) et scènes X réalisées
avec des doublures, aucun des acteurs n'ayant participé à ses séquences. Tout est si mal amené qu'il est impossible de prendre au sérieux cette histoire qui part tout azimut et réserve de joyeux moments d'une débilité profonde (l'octogénaire lubrique qui espionne au périscope les ébats d'un couple lesbien dans une grange).
Parallèlement on subit les déboires sentimentaux d'une infirmière un rien féministe. Incroyablement bavard, ces séquences n'apportent rien à l'histoire et ne semblent exister uniquement pour combler le vide du scénario. Insupportables, d'une incroyable lourdeur (l'interminable leçon de drague que donne Daniara à son petit ami, tentative louable mais
ratée pour mettre en parallèle le sexe et les rapports humains), on attend plus qu'une chose: qu'elle se fasse enfin kidnappée et violée lors des dernières vingt minutes. C'est d'autant plus long que Giochi carnali dure quasiment deux heures dans sa version intégrale. Affublé de dialogues absurdes, dénué de véritable mise en scène, enlaidi par une photographie des plus médiocre, accompagné d'une partition musicale hideuse, Giochi carnali ennuiera plus qu'il ne dérangera. Voilà qui est dommage car cette idée de mélange des genres, souvent vu dans le hardcore transalpin, était intéressante comme auraient pu l'être ces deux principaux protagonistes, plus spécialement le travesti soumis aux ordres d'une mère possessive. Bien
utilisé, voilà qui aurait pu donner au film un coté aussi malsain que pervers. On imagine ce que ce type de sujet aurait donné dans les années 70, à l'âge d'or de la sexploitation, sous la férule de metteurs en scène appliqués. Raté!
Restent donc au crédit du film quelques viols et bien entendu la castration qui clôt le film. La jeune infirmière encore groggy s'empare d'un scalpel, entaille les bourses de ses agresseurs endormis et en extrait les testicules qu'elle plonge dans un bocal de formol posé face aux deux hommes. On est loin, très loin des détails chirurgicaux de Horreurs nazies mais les plus sensibles devraient esquisser une légère grimace.
Sous couvert de crédibilité, une pancarte nous informe que cette histoire est tirée d'un fait réel, un subterfuge alors courant dans ce type de cinéma. Si Bianchi le dit... Mais c'est avant tout pour la présence de Sirpa Lane, l'ex-égérie de Roger Vadim qui forgea sa renommée sur La bête de Borowczyk, qu'on s'attardera sur le film. Sirpa qui jamais ne réussit à réellement percer au cinéma, trop marquée par ce rôle, s'égara alors en Italie où elle apparut dans une série de petits films érotiques et d'exploitation avant sa lente déchéance. Plus monolithique et bouffie que jamais, ayant perdu le peu de sex-appeal qui lui restait, c'est avec ce curieux mais trop triste Giochi carnali qu'elle mettra un terme à sa carrière. A ses cotés, on remarquera
le girond et moustachu Franco Parisi qu'on avait déjà repéré dans Libidine, Brunello Chiodetti et l'androgyne Domenico Anastasi dont ce fut la seule apparition à l'écran. L'amateur reconnaitra, non créditée, la queen porn Pauline Teutscher, la jeune fille violée en ouverture de film. Ceux qui ont l'oeil remarqueront l'apparition plus que furtive de Paolo Gramignano en infirmier, un caméo non crédité. Signalons que Pino Curia est une doublures des deux violeurs. Quant à Maria Pia Calfiero, si elle est notifiée dans les crédits, elle n'apparait nullement dans le film.
Rape and revenge, comédie friponne, hardcore... l'amateur choisira là où il voudra bien ranger ce film hésitant raté qu'il visionnera en avance rapide pour n'en garder que le plus croustillant, les viols et les scènes pornos et de viols, ce pourquoi on se souviendra du film. Le mariage des genres aurait pu être ici original même si unir le rape and revenge à la comédie n'est pas forcément évident. La tâche était bien trop lourde pour un metteur en scène aussi peu talentueux que Andrea Bianchi. Dommage!
Si Giochi carnali, totalement inédit chez nous, fut le bien triste chant du cygne de Sirpa Lane il témoigne bien malheureusement aussi de l'agonie du cinéma d'exploitation transalpin. Mais venant de Bianchi on en attendait guère une renaissance de toutes façons.