La maschera del demonio
Autres titres: Le masque du démon / Mask of the demon / Black sunday / House of fright / The hour when Dracula comes / The demon's mask
Réal: Mario Bava
Année: 1960
Origine: Italie
Genre: Epouvante
Durée: 87mn
Acteurs: Barbara Steele, John Richardson, Andrea Checchi, Ivo Garrani, Arturo Dominici, Enrico Olivieri, Antonio Pierfederici, Tino Bianchi, Clara Bindi, Mario Passante, Renato Terra, Germana Dominici...
Résumé: Au 17ème siècle la sorcière Asa et son amant Igor sont accusés de vampirisme. Suppliciés, ils promettent de se venger contre leurs tortionnaires par delà la mort. Asa meurt un masque garni de pointes métalliques enfoncé sur le visage. Deux siècles plus tard, la malédiction se réalise. Asa et son amant reviennent à la vie pour semer mort et destruction...
Le masque du démon fut le premier film que Mario Bava réalisa entièrement seul en cette année 1960 après avoir souvent assisté Riccardo Freda sur ses tournages.
A la vision du film, on sent nettement les influences de la vague gothique qui déferlait alors sur les écrans par le biais de la prolifique firme anglaise Hammer dont Bava s'est fortement inspiré ici. Tirée d'une oeuvre de l'écrivain russe Nikolai Gogol à savoir The Viy, Le masque du démon est un somptueux cocktail de légendes de sorcières, de vampires et de revenants. C'est de ce formidable mélange que vient la richesse et la réussite du récit.
Bava propose avec son film un nouveau regard sur le cinéma d'horreur de la fin des années 1950 . Il parvient avec brio à développer une atmosphère gothique terrifiante avec ces éléments incontournables du genre que sont cimetières désolés, paysans superstitieux, lande embrumée, ruines inquiétantes et autres châteaux à l'abandon que le sublime noir et blanc rend encore plus angoissants. L'étrangeté de l'ambiance est aussi rendue grâce au soin porté aux décors. Ainsi, châteaux, cryptes et passages secrets sont couverts d'ornements inquiétants, de gargouilles étranges...
Habile metteur en scène et directeur de la photographie extraordinaire, Bava sublime le tout par son talent d'artiste hors pair. Le film frappe alors avant toute chose par cette atmosphère poétique et ses images magnifiques. Mais Le masque du démon ne vaut pas seulement par la beauté de ses images et l'étrangeté qu'il distille, c'est également un film magistralement mis en scène, bénéficiant d'un rythme qui jamais ne faiblit et parvient à tenir en haleine le spectateur d'un bout à l'autre.
Bava ose même quelques plans d'une violence assez inhabituelle pour l'époque dont ces clous enfoncés dans les yeux, cette tête brûlée dans le feu ou encore cette morte-vivante qui se promène les viscères à l'air. Cela marque les débuts d'un ère nouvelle, celle d'une violence esthétisée et d'un raffinement dans la cruauté qui deviendront sa marque de fabrique. L'ouverture est en cela impressionnante, les terribles représentants de l'Inquisition mettant à mort la sorcière et son amant à l'aide d'un masque hideux dont l'intérieur est garni de pointes acérées qui s'enfoncent dans les chairs des suppliciés.
Tout aussi intéressant est cette fascination que Bava développe sur l'ambiguïté et le trouble des relations, ici reposant sur le personnage de la sorcière et de sa descendante dont elle est le parfait sosie. Une bonne partie du film joue sur cette ressemblance afin de mieux perdre le spectateur ou ses protagonistes eux mêmes. La jeune Katia en effet n'a de cesse d'être confrontée à son ancêtre jusqu'à leur rencontre dans le somptueux final dans la crypte où leur total antagonisme éclatera de façon magistrale. Dans ce fascinant jeu d'identités trompeuses, les masques, les portraits, les armures disposées dans le château et les statues aux regards fixes sont autant de présences menaçantes et troublantes qui viennent renforcer l'ambiance mystérieuse du film.
Mais Le masque du démon peut également être vu comme une tragédie à travers le personnage de la jeune Katia, victime d'une malédiction familiale et terrorisée par les morts qui s'accumulent autour d'elle, Katia persécutée par une morte bien décidée à lui ravir sa place parmi les vivants.
Le masque du démon, énorme succès alors en Italie mais également en France à sa sortie, donna naissance à la véritable épouvante à l'italienne et à toute un vague de films tels que La vierge de Nuremberg, Danse macabre ou L'effroyable secret du Dr Hichcock et sa suite.
Aujourd'hui encore La maschera del demonio demeure un joyau du fantastique où le talent et la beauté spectrale de Barbara Steele si bien mise en valeur par Bava irradie l'écran. Barbara, alors quasiment inconnue, deviendra suite à ce film l'une des reines incontestées de l'épouvante gothique et traversera majestueusement les années 60 dans une multitude d'oeuvres du genre tant anglaises qu'italiennes.